Lausanne propre en ordreAmendé pour avoir jeté ses épluchures à la poubelle
Serge Veuve, 77 ans, s’est fait verbaliser par des agents de la propreté pour ne pas avoir trié les restes de son pique-nique pris sur son bateau. La Ville légitime la prune.

Sur le pont du voilier Pénélope ancré le long de la place de la Navigation, le temps est à l’orage. Le Lausannois Serge Veuve, marin au long cours de 77 ans, ne décolère pas. La grosse tempête. «J’en suis malade. J’ai comme une boule au ventre. Toute cette histoire me rebouille depuis des semaines.»
C’est que l’homme s’est pris une amende de 150 francs au début du mois de juin. Sa faute: avoir jeté des déchets ménagers à la poubelle, sans les avoir triés au préalable.
«C’étaient les restes de mon pique-nique pris à bord. Ils tenaient dans un sac pour déjections canines. Mais on vit dans quel monde?» s’insurge le retraité. À la Ville, on rappelle que les poubelles de rue ne sont destinées qu’à la récolte des déchets dits «spontanés» consommés sur l’espace public.
Il est vrai que le repas de Serge Veuve était frugal. Et les déchets ménagers peu encombrants. Il détaille. «Il y avait les épluchures d’un concombre, un trognon de pomme et les pépins de tomate cerise. Et aussi un berlingot de jus d’orange.»
Sa sortie sur le lac terminée, et la passerelle du voilier remontée, c’est donc tout naturellement que le Lausannois s’approche de la première poubelle et y dépose son petit sac.
«J’avais bien remarqué trois personnes habillées en gris avant de descendre du Pénélope, mais je n’y avais pas bien prêté attention.» Il s’agissait en réalité d’agents de la propreté chargés de lutter contre la dépose sauvage de déchets. Serge Veuve va vite apprendre à les connaître.
«Je me suis senti comme le pire des criminels.»
«J’ai soudain entendu quelqu’un qui m’appelait. «Monsieur! Monsieur!» Et sur quel ton! Mais quel manque de respect.» Serge Veuve pile net. L’homme en gris lui demande s’il reconnaît avoir jeté un petit sac à l’instant, puis ouvre la poubelle avec une clé spéciale, sort le sac, le pose sur le sol et l’éventre.
«Il tournait en boucle. Il me disait de ne pas m’énerver, alors que je gardais mon calme. Tout ça en postillonnant et sans masque.» L’agent prend des photos du délit. «Je crois que s’il y avait eu de la cocaïne dans ce sac, il n’en aurait pas été autrement. Je me suis senti comme le pire des criminels. Je ne pouvais sortir un son tellement j’étais sous le choc.»

«Les bras m’en sont tombés»
Après avoir écouté une longue théorie sur les déchets, Serge Veuve doit présenter sa carte d’identité. Et il se voit amender pour dépôt non conforme de déchets ménagers. Montant: 150 francs. «Quand je fais une connerie, je suis du genre à l’assumer, toujours, mais là franchement, les bras m’en sont tombés.»
Le retraité décide donc d’écrire à la police pour demander «un peu de mansuétude» et l’annulation de l’amende. En vain. «On m’a répondu que si je ne payais pas les 150 francs, mon cas serait transmis à la commission de police et qu’en cas de condamnation, cela me coûterait 200 francs de plus.»
Sur le pont du Pénélope, à bord duquel Serge Veuve et sa femme ont fait le tour du monde pendant huit ans, le retraité soupire. «Nos économies se sont évaporées sur les océans. Vous savez, c’est beaucoup pour nous, 150 francs, mais au final, j’ai payé.»
«Nous sommes obligés malheureusement de prévoir un système répressif face à ces comportements inadéquats.»
«Nous relevons depuis quelques années au bord du lac une augmentation des déchets des plaisanciers, dits déchets assimilés à des ordures ménagères, et déposés soit dans les poubelles de rue soit aux pieds de ces dernières», explique Stéphane Beaudinot, chef du Service de la propreté urbaine.
La règle: les déchets produits dans l’espace privé doivent être éliminés par le biais d’un sac officiel taxé, indépendamment de leur volume. Et Serge Veuve était sur son bateau, donc un espace privé. «Nous sommes obligés malheureusement de prévoir un système répressif face à ces comportements inadéquats», poursuit le chef de service.
À noter qu’une nouvelle infrastructure est en place depuis la semaine dernière et permet aux possesseurs d’embarcations du port d’Ouchy de trier et éliminer des déchets via des contenants mis à disposition, et ce sans être en infraction en remplissant les poubelles de rue.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.