Au gymnase de Renens, les livres d'art deviennent art
Depuis la rentrée d'août, l'établissement flambant neuf abrite une bibliothèque à nulle autre pareille, œuvre d'une artiste lausannoise.

Au nouveau Gymnase de Renens, les murs ne sont pas tous mornes et gris. Dans le hall principal, l'un d'eux offre même un spectacle saisissant: celui de centaines de livres encastrés à même le béton. Mille deux cents, c'est leur nombre exact, soit un pour chaque gymnasien que peut accueillir l'établissement. Sans codes-barres et sans fiche de prêt, ils sont à l'entière disposition de ceux qui veulent les feuilleter, quelques minutes ou quelques heures.
Elément d'architecture, bibliothèque et projet artistique, l'installation – simplement monumentale – est tout cela en même temps. Pour expliquer sa démarche, l'artiste qui l'a conçue, Sophie Bouvier Ausländer, saisit un petit livre niché dans le mur: Manières de faire des mondes, du philosophe américain Nelson Goodman. «Pour façonner notre propre monde, nous nous inspirons d'autres mondes qui sont à notre disposition, explique-t-elle en paraphrasant le penseur. Ces livres sont là pour ça. Pour que les élèves les prennent et qu'ils en fassent leur propre univers.»
Dans leurs explorations, les gymnasiens de Renens ont l'embarras du choix. De toutes les tailles et de toutes les couleurs, neufs ou de seconde main, rares et précieux pour certains, les livres sont à la fois innombrables et uniques, chacun à sa place dans un interstice taillé précisément à sa dimension. Leur seul point commun: tous sont des ouvrages d'art, du genre que l'on trouve rarement dans les chambres d'adolescents, ou alors, qui prennent la poussière sur les rayons des bibliothèques. Parmi eux, des monographies d'artistes, de Joseph Beuys à Anish Kapoor, des catalogues raisonnés, des recueils de poèmes ou encore des introductions aux estampes japonaises. «Certains d'entre eux sont de vrais bijoux», sourit Sophie Bouvier Ausländer, qui a sélectionné elle-même une partie de la collection, en y ajoutant aussi des donations d'artistes et de musées de tout le canton.
«De nombreux jeunes peuvent avoir envie de se plonger dans ce type de livres, encore faut-il qu'ils tombent dessus. Il fallait créer cette occasion»
A priori, pas facile d'ouvrir le gymnasien moyen à des univers artistiques aussi pointus. C'est pourtant le défi qu'a voulu relever la plasticienne lausannoise en plantant sa bibliothèque en plein cœur du gymnase: «De nombreux jeunes peuvent avoir envie de se plonger dans ce type de livres, mais encore faut-il qu'ils tombent dessus. Il fallait créer cette occasion.» Et pour ajouter à la spontanéité de la découverte, l'artiste a tenu à brouiller les codes: «Les ouvrages sont ordonnés de manière purement visuelle. Ça a tendance à perturber les bibliothécaires, mais l'idée est vraiment d'inciter à la flânerie, pas de chercher et trouver un livre en particulier.»
En six mois d'existence, la bibliothèque paraît avoir trouvé un public prêt à jouer le jeu. La preuve, aucun livre ne manque à l'appel, malgré l'absence totale de contrôle et de traçage: «Faire confiance aux jeunes était un aspect important de ce projet. On ne peut pas leur mettre des barrières constamment et sûrement pas dans le champ artistique», conclut l'artiste.
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