Je suis allé chaque année à Ouahigouya, au nord-ouest du Burkina Faso, de l’an 2000 à juin 2021. Si, dans la ville même, il n’y a jamais eu d’attentat, la situation est explosive aux abords. Il n’y a plus de Blancs; auparavant une ONG broyarde organisait régulièrement des missions chirurgicales, c’est terminé, trop dangereux.
Le pays compte 1,8 million de personnes déplacées, 6200 écoles sont fermées et la région de Ouahigouya n’est pas en reste. Pour les djihadistes, ou terroristes, les représentants de l’État sont une cible privilégiée, alors tous les maires ou autres autorités des environs se sont repliés vers la grande ville. Il y a des personnes déplacées dans la ville ou aux abords.
«C’est l’idylle avec la Russie, jugée désintéressée…»
Je suis allé plusieurs fois au camp dit «sur la route de Youba». Voici quelques mois, les 2000 personnes qui habitent là-bas ont été attaquées par les terroristes qui ont brûlé des tentes. La plupart des déplacés sont restés mais les Peuhls sont partis on ne sait où. Il est vrai que cette ethnie a mauvaise réputation; les Peuhls formeraient 90% des troupes terroristes. Le plus important pour ces gens est de pouvoir manger. Alors le matin des colonnes se dirigent vers Ouahigouya pour trouver un petit boulot. Ils sont aidés par le Programme alimentaire mondial (PAM), mais celui-ci n’a pas toujours de nourriture en suffisance.
Le 15 avril 2023, l’aéroport, situé près de la ville, surveillé par des militaires et des VDP (Volontaires pour la défense de la patrie), a été attaqué par plus de 400 terroristes. Il y a eu six militaires, 34 VDP tués et 33 blessés. Cinquante morts parmi les terroristes. Depuis peu, l’armée dispose de drones qui permettent de suivre les terroristes jusque dans leurs repaires. Dans ce cas précis, comme dans d’autres, on peut admettre que l’attaque a eu lieu à la suite d’une trahison.
L’optimisme revient
Malgré cette situation explosive, l’optimisme gagne du terrain dans la population depuis que le capitaine Ibrahim Traoré est au pouvoir après son coup d’État le 22 octobre 2022. Avec lui l’armée est présente, visible, engrange des succès, et à certains endroits reprend du terrain. Hélas, cela a un coût en vies humaines. Précisons que pour le citoyen qui lutte pour avoir trois repas par jour, le fait que ce soit une dictature ou une démocratie le laisse totalement indifférent!
D’autre part, dans les pays africains, il faut des hommes à poigne. L’ancien président Blaise Compaoré, débarqué en 2014, était un affreux bonhomme, mais sous son règne «il y avait de l’argent» et pas de djihadistes! Sur le plan politique, le pays prend ses distances avec la France. Les 400 militaires stationnés à Ouagadougou ont dû partir, les journalistes de «Libération» et du «Monde» ont été expulsées, la radio RFI et la chaîne de télévision France 24 sont suspendues. Et maintenant, c’est l’idylle avec la Russie, jugée désintéressée…
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
L’invité – Burkina Faso: pourrai-je un jour retourner à Ouahigouya?
Les terroristes sont toujours très actifs dans ce pays qui compte 1,8 million de personnes déplacées.