Alors que les festivaliers, en bout de course d’une quinzaine harassante, errent tels des zombies en guenilles sur une Croisette qui commence petit à petit à se déserter, les certitudes vacillent et les illusions demeurent, du moins à l’aune des différents bilans qui se profilent. Cannes va se terminer, et deviner qui va remporter la Palme d’or semble peine perdue. Le Marché du film a fermé ses portes et les vendeurs ont fait le plein de contrats.
Mais surtout, le trop-plein offert par la sélection cette année a rempli ses promesses, jusqu’à étouffer les sections parallèles. Il y a désormais deux festivals de Cannes. Même trois, si l’on ajoute celui du glamour, de la montée des marches reflétée dans les revues people et nulle part ailleurs. Deux festivals: celui de la section officielle, qui déborde de films comme jamais, et celui des sections parallèles, Quinzaine des cinéastes, Semaine de la critique et ACID. Fréquenter les deux n’est plus pensable, à moins de tout faire à moitié.
Fracture alourdie par la billetterie numérique, qui aura été le cauchemar de tous ces festivaliers qui ont un badge moins important, qui passent leurs matinées à ramer pendant que d’autres se dorent au soleil (sauf en cas de pluie) ou s’assoupissent en salle. La première année après le Covid, en 2021, tout fonctionnait à merveille – ou presque. Il y avait moins de monde, donc chacun pouvait espérer trouver des tickets pour les films qu’il voulait. Mais en 2022 déjà, la billetterie en ligne commençait à tourner de l’œil. Cette année, elle a carrément implosé.
Le système cannois doit une fois de plus être revu. Repensé. Rééquilibré. Cannes est sans doute victime de sa taille, de sa boulimie – tout le monde veut en être – et de sa démesure. Jusqu’à perdre le rapport avec le réel. Cette déréalisation a certes parfois du bon, mais poussée à l’extrême, elle n’est plus saine du tout.
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L’éditorial – Cannes implose et doit se ressaisir