Les chiffres sont impressionnants. Selon une étude de la société d’audit KMPG en coopération avec la HES de Berne, les coûts des conflits en entreprise se chiffrent entre 100 000 et 600 000 euros annuels pour les PME allemandes comptant jusqu’à 100 employés. De 10 à 15% du temps de travail de chaque employé et 30 à 50% pour les managers sont occupés par la gestion des conflits en entreprise et 25% du chiffre d’affaires dépend directement de la qualité de la communication. La Chambre économique d’Autriche ou encore l’Eckert College aux USA arrivent à des conclusions très similaires. Le magazine «Harvard Business Manager» ajoute que 53% des sondés indiquent avoir vécu un conflit durant les douze derniers mois et que 15% seraient restés à la maison sans être malades pour échapper à un conflit au travail. Tout ceci encore sans parler de la souffrance humaine.
Quid alors de la prévention? Entre «nous n’avons pas de conflits», «nous sommes trop petits pour prévenir» ou encore «le cas échéant on agira», on constate un grand manque de sensibilisation et donc une absence de mécanisme de prévention des conflits au travail au sein des PME de Suisse romande. Il s’agit pourtant d’une obligation légale depuis un arrêt du Tribunal fédéral de 2012 en la matière. Tout employeur, quelle que soit la taille de sa société, doit préserver la santé psychosociale de ses employés.
«Toute entreprise a intérêt, en plus de l’obligation légale, à mettre en place un mécanisme de prévention et de gestion des conflits»
La jurisprudence et les directives du Secrétariat d’État à l’économie (SECO) préconisent la désignation d’une personne de confiance formée, hors hiérarchie, vers laquelle les employés peuvent se tourner en situation de conflit, de harcèlement ou de toute autre situation qui impacterait leur santé sur le lieu de travail.
Aucune entreprise n’est trop petite, comme l’illustre le cas de cet indépendant avec une seule employée qui se voit du jour au lendemain privé de cette dernière pour absence maladie puis déféré devant un tribunal pour accusation de harcèlement sexuel. Effectivement, depuis une jurisprudence en 2017, c’est l’effet sur la victime présumée et non plus l’intention de l’auteur présumé qui est déterminant en matière de harcèlement.
Pas très compliqué
Toute entreprise a donc intérêt, en plus de l’obligation légale, à mettre en place un mécanisme de prévention et de gestion des conflits. Ce n’est ni une usine à gaz, ni un engagement lourd sur le plan financier, au contraire. Il suffit de désigner une personne de confiance et d’en informer les employés pour être conforme à la loi en matière de prévention. Le développement d’une charte, la sensibilisation des responsables, etc. sont certes souhaitables, mais optionnels.
Jusque-là, c’est possible sans coûts. En cas d’intervention du médiateur, l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail chiffre le retour sur investissement à 13 euros de bénéfice pour chaque euro investi dans la prévention. Concrètement, les expériences des dernières années montrent que le nombre d’interventions correspond à 1% du personnel, donc un cas par an pour 100 employés. La prévention des conflits en entreprise est un placement extrêmement rentable.
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L’invité – Conflits en entreprise: mieux vaut prévenir que guérir
Pascal Gemperli décortique les avantages de la médiation.