Pourquoi tu cours, Forrest? «J’ai juste envie de courir.» Trente ans après la sortie en salle de «Forrest Gump», la réponse ingénue du protagoniste cachait, sans doute un peu malgré lui, une prémonition. La révolution running était déjà passée par là outre-Atlantique. Il faudra attendre quelques années encore pour voir l’Europe lui emboîter la foulée. Un mouvement de libération des corps et surtout des esprits: on court pour oublier, mais aussi pour réfléchir. Se vider la tête pour mieux la remplir, faire de la place puis la prendre.
Demandez à Dominic Lobalu: si courir c’est d’abord s’enfuir, s’échapper c’est aussi conquérir. Voire reconquérir, une vie qui lui a été volée, une identité qui lui a été refusée. Une quête de soi sans ligne de départ ni ruban d’arrivée: pourquoi s’arrêter lorsqu’on ne sait pas où on a commencé? Avancer, au moins, c’est la promesse de ne pas reculer: une certitude qui a le mérite d’exister quand on n’en a aucune autre.
«Demandez à Dominic Lobalu: si courir c’est d’abord s’enfuir, s’échapper c’est aussi conquérir. Voire reconquérir, une vie qui lui a été volée, une identité qui lui a été refusée.»
Attaché à rien, détaché de tout, porté par le vent, comme un cerf-volant qui danse dans un ouragan, Dominic Lobalu a couru pour sauver sa peau avant de courir pour gagner sa croûte. Question de survie, jusqu’à en crever. Enchaîner les efforts pour oublier la peine. Rien de mieux que la douleur physique pour faire taire la détresse psychologique. Laisser hurler ses muscles pour couvrir les voix des fantômes du passé, se délecter de chaque lancée d’acide lactique.
Dominic Lobalu, comme Forrest Gump, nous offre en somme une leçon de stoïcisme. Accepter le moment tel qu’il se présente, et continuer de courir, un pied devant l’autre, pour se réfugier dans le peu de chose que l’on maîtrise assurément. Pas par fatalité, plus humblement par nécessité. Courir sans ambition ni objectif, mais simplement pour se rapprocher d’un avenir forcément meilleur.
Se laisser porter par sa foulée est alors un acte de défiance vis-à-vis du destin: fais ce que tu veux de moi, je continuerai à avancer inexorablement. Car la vie, c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber.
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Comme Forrest Gump – Courir pour s’inventer une vie
Dominic Lobalu, prodige de la course à pied mondiale, est un exemple d’abnégation. Pour lui comme pour beaucoup, courir est une quête d’identité.