Sorties cinéma«Crazy Bear», «Ailleurs si j’y suis»: quels films aller voir cette semaine?
Un ours qui sniffe, un sage-homme qui accouche, méfions-nous des apparences. Il y a des films à l’affiche!
«Crazy Bear», cet ours préfère la coke

On aurait aimé que le film soit à la hauteur de son résumé. Qu’il s’envole dans le pur délire ou au contraire vire au gore outrancier et sanguinolent. Rien de tout cela dans ce «Cocaine Bear» qui oscille trop entre deux genres pour devenir un phénomène en soi.
À la base, des trafiquants ratés trouvent le moyen de larguer leur chargement de cocaïne dans une forêt pas du tout déserte. Un ours brun passe dans le coin et fourre son nez dans le sachet. Le contenant lui plaît et il se met à chercher s’il en trouve d’autres. Mais en cours de route, il croise des gens, promeneurs en goguette, gosses en vadrouille ou flics, et devient fou au point de vouloir les tuer.
Le jeu de massacre reste jouissif mais avare en effets – on voit quelques moignons de jambes s’envoler, quelques tripes jaillir et des cadavres mutilés, bref pas de quoi alerter l’amateur d’horreur. Elizabeth Banks (car «Cocaine Bear» est un film de femme, et on doit même à sa réalisatrice les trois volets de «Pitch Perfect») s’en tient visiblement à ce que la production lui a demandé de faire. Soit une sorte de comédie pour adultes (et surtout pour ados) inoffensive avec un monstre inédit, sur un sujet peu courant, dénonçant au passage l’abus de drogues.
Mais ce qui est réjouissant sur le papier, voire dans un trailer, devient rapidement poussif lorsque la mise en images ne suit pas. L’amateurisme relatif du résultat, son obsession à privilégier le gag à tout prix au détriment de l’effroi, crée une distance dont on se serait finalement bien passé. L’ensemble conserve un statut de petit film (sympa? même pas) sans ambition ni envergure. Pas loin de ces métrages qui ne sortent dorénavant plus qu’en streaming ou en DVD.
Note: **
«Sage-homme», accouche-moi si tu peux

Dépité car recalé par le numerus clausus à l’entrée en médecine, Léopold (Melvin Boomer) se résout à intégrer l’école de sages-femmes. Honteux d’évoluer dans ce milieu très féminin, le jeune homme afro-bourgeois cache la vérité à sa famille et à ses potes. Pourtant, peu à peu, secoué par l’énergique patronne du service (Karin Viard), ébranlé par la brutalité du travail des parturientes, dopé par les urgences vitales, le «sage-homme» se construit.
La réalisatrice Jennifer Devoldère reste fidèle à ses premières chroniques familiales filmées en quasi-direct dans la réalité du vécu. La méthode affiche sans complexe les défauts de ses qualités. Jouant l’identification, le scénario suit un cours prévisible jusqu’à la paresse coupable.
Dommage, car d’autres cinéastes ont creusé le sujet, de «Sage femme» avec Catherine Frot à «C’est la vie», de Julien Rambaldi. Ici, qu’il s’agisse d’un climat sexiste odieux, du mépris d’une profession «entre deux» ou de racisme ordinaire, tout tente de prendre du relief.
Par contre, les gros plans sur col d’utérus dilaté à l’extrême ne semblaient pas nécessaires. À moins de vouloir vérifier que le spectateur ne soit pas en train de s’endormir ou de quitter la salle.
Note: **
«La chambre des merveilles», rêve éveillé

Lisa Azuelos adapte le best-seller tire-larmes de Julien Sandrel et, miracle, trouve une sobriété qui évite le déluge de bons sentiments. Son arme secrète, l’actrice Alexandra Lamy, se montre parfaite en héroïne de proximité.
Quand Louis, 12 ans, sombre dans le coma après un accident de skate-board, sa mère rumine le passé, remue les non-dits. Un journal intime où l’ado a noté «10 choses à faire avant la fin du monde» lui indique soudain une porte de sortie de l’inaction. Partant à la découverte des baleines en Polynésie, se mettant en quête d’un mystérieux dessinateur de manga à Tokyo ou s’essayant à la piste noire dite Balinaise pour skaters avertis, Thelma va finalement se trouver elle-même.
La comédie sentimentale pur jus prête souvent à moqueries cinéphiles, mais avouons qu’en la circonstance la réalisatrice de «LOL» et autres chroniques maternelles du XXIe siècle cadre son sujet avec une franchise bien carrée. Même si l’équilibre émotionnel semble aussi précaire que sur une planche à roulettes lancée à pleine vitesse, une petite magie opère qui garde le film debout, droit dans ses baskets.
Note: ***
«Ailleurs si j’y suis», au moins Bideau y est

Père de famille peinard, architecte stressé… Mathieu pète un câble à l’orée de la cinquantaine, traverse son jardin et tourne le dos à sa piscine coquette pour s’enfoncer dans les bois. Dans les mots du réalisateur belge François Pirot, son blues contamine son entourage qui débloque «comme des poules qui courent avec le cou juste tranché».
Son père déprimé par son veuvage ponce son cercueil, sa femme doute de sa quiétude embourgeoisée, son pote flippe à l’idée de s’engager dans une relation durable. Même son patron – Jean-Luc Bideau fidèle à lui-même, ronchonne de voir s’éloigner cet héritier qu’il aime comme un fils.
La fable peine à convaincre malgré quelques éclats romanesques, tel ce cerf qui surgit en symbole mâle et majestueux de la nature sylvestre. Un peu de surréalisme pointe ici et là dans le morne paysage de la vie moderne. Pourtant, le tableau charme avec la dérision d’une croûte trouvée dans une brocante du Plat Pays. C’est dans ce manque résolu de séduction que ce film absent à lui-même trouve sa force et sa faiblesse.
Note: **
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