The Offspring se pose sur la crête des pierres d'Avenches
Issus d'une scène punk confidentielle, les Californiens sont devenus géants pour arènes. Que reste-t-il de nos amours?

«Jouer du punk rock à New York dans les années 80, ça faisait sens: il fait moche, froid, l'eau sort des égouts et il y a un cadavre qui flotte. Alors qu'avait-on à revendiquer sous le soleil de Los Angeles?» La question posée par Henry Rollins dans le documentaire Punk Attitude, de Don Letts, est une bonne question. Elle accompagne depuis bientôt quarante ans le malentendu sur le punk made in California, aussi surnommé «punk mélodique», «punk à roulettes» ou «pop punk» et dont The Offspring, jeudi soir, présentera à Rock Oz'Arènes la version la plus populaire.
Deux écoles
De fait, les palmiers de Sunset Boulevard ont vibré au son du punk. Et parfois de façon plus agressive que sur la côte est des Etats-Unis. On surnomma hardcore ce dérivé hargneux du punk anglais qui fit florès en Californie à la fin des années 1970, alors que les scènes londoniennes et new-yorkaises s'éparpillaient en des adaptations intellos ou métissées. Deux écoles cohabitent alors entre Los Angeles et San Francisco: le hardcore, violent en diable (Black Flag, vaisseau de Henry Rollins) ou politisé (Dead Kennedys); et le punk mélodique de Bad Religion, caractérisé par des formats courts, des tempos frénétiques et des voix claires, soutenues par des chœurs en rasades généreuses. En 1985, The Offspring est né de cette seconde école.
Et puis… même un chien pelé et boiteux peut accéder aux meilleurs foyers. Contre toute attente, le punk américain a décroché la lune. Dans les eighties, tous ces groupes et minilabels ont sillonné sans relâche les Etats-Unis pour préparer la mutation à venir. En 1991, Nirvana fut le premier à accéder au succès massif. Trois ans plus tard, The Offspring fait mieux encore, en termes commerciaux: alors que le gang de Kurt Cobain avait signé Nevermind sur la major Geffen, le quartette de Huntington Beach sort Smash sur le label indépendant Epitaph, fondé par le guitariste de Bad Religion. Qui devient riche: Smash s'écoule à 11 millions d'exemplaires dans le monde! Du jamais-vu.
Trahison?
The Offspring a-t-il trahi la cause? s'effraient alors les fans de la première heure. «Quelle cause?» rétorquent les nouvelles stars, devenant, avec Green Day, ces rockers de stades contre l'arrogance desquels les scènes punk s'étaient bâties. The Offspring impose sa mue en signant avec Sony Music dès 1996 et un nouvel album à succès. Le groupe creuse sans complexe la formule qui a fait sa force, soit des refrains de baleiniers rentrant au port, de ceux que l'on chante sous la douche, dans les bistrots ou dans les stades. Pas des plus finauds, mais efficaces. Devinant que le tempo rapide du punk s'essoufflera vite, il choisit des rythmiques medium, renforçant encore sa ressemblance avec les ténors du «classic rock» américain tant honni. Enfin, il s'acoquine avec le producteur Bob Rock, celui de Metallica, garant de sons radiophoniques larges et carrés assez éloignés des ruades crasseuses d'Ignition, le disque d'Off-spring favori des puristes, sorti en 1992.
Jeudi, neuf albums en poche, The Offspring retrouve des arènes broyardes qu'il avait déjà secouées en 2004. Si punk signifie tirage de langue et gros son, le concert sera punk. Les vieilles pierres, cependant, devraient sortir indemnes de cette mise en spectacle hollywoodienne d'une époque de bruit et de fureur.
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