En tant que syndicat, nous partageons l’inquiétude de Jean-Marc Demierre, président de la Fédération vaudoise des entrepreneurs (FVE), quant au grave manque de relève qui plane sur les métiers du bâtiment et dont il a fait part dans ces colonnes («24 heures» du 9 juin 2022).
Toutefois, pour qu’un jeune se lance dans une carrière, quelle qu’elle soit, celle-ci doit offrir son lot de perspectives en termes de développement personnel et professionnel. Et à ce sujet, il convient de relever qu’il y a encore du pain sur la planche, notamment en ce qui concerne les conditions de travail dans la branche de la construction.
«Nous assistons depuis des années à une explosion des rythmes de travail, due entre autres aux délais irréalistes fixés par les maîtres d’ouvrage et les directions de travaux.»
Il est faux de prétendre que la pénibilité du travail a baissé avec l’avènement des machines de chantier. Certes, les ouvriers du bâtiment ont été soulagés ces dernières décennies de certaines tâches archaïques et pénibles par les grues ou les pelles mécaniques par exemple. Mais dans les faits, nous assistons depuis des années à une explosion des rythmes de travail, due entre autres aux délais irréalistes fixés par les maîtres d’ouvrage et les directions de travaux. On travaille donc toujours plus, plus vite, avec moins de personnel, et ce par tous les temps, y compris dans les situations de canicule extrême que nous avons connu ces derniers jours.
Vu ce contexte, la position de la Société suisse des entrepreneurs (SSE) dans le cadre des négociations pour le renouvellement de la convention collective nationale de la branche (CN) est incompréhensible.
Aux revendications des travailleurs, qui demandent l’introduction d’une pause payée, d’une juste indemnisation des déplacements et une meilleure protection contre les intempéries, la SSE oppose un projet de hausse de la flexibilité horaire, permettant de travailler jusqu’à 50 heures par semaine, une possibilité de baisser les salaires pour les travailleurs plus âgés, et aucune revalorisation du pouvoir d’achat malgré une augmentation ahurissante du coût de la vie (sans parler de la hausse des primes maladie à venir).
Position cynique
Pire, certaines sections alémaniques de la SSE évoquent le renoncement pur et simple à la convention collective… Quand on sait que celle-ci garantit le financement d’une partie importante des formations proposées dans la construction, on ne peut que souligner le cynisme d’une telle position!
Pas étonnant dans ces conditions que la filière peine à recruter et à remplacer la main-d’œuvre qualifiée issue de la génération du baby-boom, qui part massivement à la retraite.
La posture de la SSE porte gravement préjudice à l’attractivité de la branche. Il est donc urgent qu’elle revienne à la raison et entende les revendications des ouvriers de la construction. Seule une discussion constructive autour du renouvellement de la convention nationale permettra de poser des bases solides pour, d’une part, rendre à ces métiers l’attractivité qu’ils méritent, et d’autre part répondre aux aspirations des jeunes d’aujourd’hui.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
L’invité – Des conditions de travail dignes pour un métier attractif!
Pietro Carobbio insiste sur la nécessité de revaloriser le domaine de la construction auprès des jeunes.