Des propriétaires devront peut-être bâtir ou céder leur terrain
Le Tribunal fédéral force Fribourg à durcir sa loi sur l'aménagement du territoire. Le Canton de Vaud devra aussi être contraignant

Vous êtes l'heureux propriétaire d'une zone à bâtir? Et vous n'y avez rien construit dans un délai de plusieurs années? Votre Commune pourrait acheter le terrain de force pour y bâtir des logements. C'est ce qu'on appelle le droit d'emption. Il pourrait être appliqué dans le canton de Vaud d'ici quelques années afin de lutter contre le mitage du territoire. Le Tribunal fédéral (TF) vient de donner tort au Canton de Fribourg qui refusait ce droit à ses communes (lire ci-dessous).
Cette décision de Mon Repos a été très suivie cette semaine par les autorités vaudoises. Et pour cause: le Grand Conseil doit justement se pencher, cet automne, sur la révision de la loi cantonale sur l'aménagement du territoire et des constructions (LATC). Un travail auquel tous les cantons doivent s'astreindre d'ici à 2019 afin de satisfaire aux exigences de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT). Après le dézonage forcé, après la taxe sur la plus-value, le droit d'emption promet une nouvelle empoignade entre la droite et les immobiliers d'une part, et la gauche d'autre part.
La commission du Grand Conseil chargée de l'examen de la LATC n'a pas encore rendu son rapport. A ce stade, pas question pour ses membres de dévoiler le plan de bataille. Mais sur le fond, «la décision des juges fédéraux montre que le projet de loi vaudois n'est pas conforme et qu'il faudra prévoir des outils un peu plus solides», constate le député Vassilis Venizelos (Verts).
Le projet du Conseil d'Etat prévoit qu'une «Commune peut conclure des contrats de droit administratif avec les propriétaires, afin notamment de fixer les délais de construction et les sanctions en cas de non-respect de ceux-ci.» Suffisant? Peut-être pas. Le gouvernement l'a d'ailleurs écrit noir sur blanc dans son exposé des motifs et projet de loi (EMPL): «Le Conseil d'Etat est conscient que ce dispositif peut être jugé insuffisant au regard des exigences du législateur fédéral.»
Pourquoi le Canton n'a-t-il pas prévu de disposition plus coercitive? Le droit d'emption «recoupe l'un des enjeux» de la loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL). Cette loi, acceptée par 55,5% des Vaudois le 12 février dernier, prévoit un droit de préemption: celui-ci accorde à une collectivité publique le droit d'acheter prioritairement un terrain pour construire des logements d'utilité publique. C'est l'une des dispositions que combattaient la droite et les milieux immobiliers. «Dans un contexte de votation relativement tendu, le Conseil d'Etat ne voulait visiblement pas charger la barque», observe Vassilis Venizelos.
La décision des juges fédéraux forcera-t-elle le Canton à introduire un droit d'emption? Pas forcément. «En l'occurrence, le TF ne dit pas qu'il faut absolument introduire un droit d'emption dans notre loi cantonale, il juge simplement que la loi du Canton de Fribourg est insuffisante en regard des exigences de la loi fédérale», nuance Pierre Imhof, chef du Service du développement territorial.
L'alternative d'une taxe
A l'heure actuelle, tous les cantons qui ont révisé leur loi pour satisfaire à la LAT (dont le Valais) ont effectivement introduit un droit d'emption. «Sauf le Canton de Berne qui a prévu un système de taxe: celle-ci est calculée en fonction de la valeur du terrain et elle augmente chaque année de manière dissuasive», signale Pierre Imhof. Cette piste pourrait être une alternative au menu des discussions du Grand Conseil.
Directeur de la Chambre vaudoise immobilière, Olivier Feller estime que ce jugement aura forcément «une incidence sur la loi vaudoise. Il s'agira de trouver un chemin entre une disposition «chewing-gum» et le droit d'emption cher à la gauche». Celui qui est aussi conseiller national (PLR) s'étonne toutefois de la décision de mercredi: «Le TF va très loin dans son interprétation de la loi, qui confine à une interprétation politique.»
La droite du Grand Conseil ne veut en tout cas pas entendre parler d'un droit d'emption. «Le droit de préemption contenu dans la loi sur le logement, c'était le maximum acceptable», considère Christelle Luisier Brodard, députée PLR et syndique de Payerne. «Nous devrons trouver une façon proportionnée d'appliquer la loi fédérale tout en respectant la propriété privée. Le Conseil d'Etat propose un changement d'affectation de la zone en cas de non-respect des délais de construction, c'est peut-être suffisant.»
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