Politique et caricatureEntre Burki et «Gorby», une authentique love story
Mikhaïl Sergueïevitch Gorbatchev et sa tache de vin distinctive ont été d’inépuisables sources d’inspiration pour le génial dessinateur de «24 heures». De sa rencontre à Genève avec le président des États-Unis Ronald Reagan à sa démission de son poste de président de l’URSS, «Gorby» est sorti une cinquantaine de fois du crayon du Palinzard.

21 novembre 1985 – Rencontre Reagan-Gorbatchev à Genève

Genève est au centre du monde les 19 et 20 novembre 1985, lorsque Mikhaïl Gorbatchev, secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique depuis le 11 mars précédent, y rencontre le président américain Ronald Reagan. Un sommet lors duquel les deux superpuissances discutent désarmement nucléaire, mais dont on ne sait alors qu’attendre – certains le considèrent comme «le sommet du baratin». Burki le pacifiste s’en amuse, avec ces deux bébés près de leur caisse à jouets atomiques.
11 octobre 1986 – Deuxième rencontre Reagan-Gorbatchev

«C’est le jour J!» se réjouit «24 heures», ce 11 octobre 1986. C’est que ce même samedi, à Reykjavik, en Islande, les deux Grands se retrouvent à nouveau pour causer, six heures durant. «De part et d’autre, on est prudemment optimiste et l’on caresse l’espoir de voir un accord sur les euromissiles prendre forme», affirme le quotidien lausannois. Burki, lui, joue sur la parenté graphique entre les fusées et les défenses des morses (des mammifères marins pourtant disparus d’Islande depuis belle lurette).
24 juillet 1987 – Les ennemis d’antan font ami-ami

Cette fois, c’est dans une marguerite qu’effeuillent Reagan et «Gorby» que Burki le poète va chercher la proximité graphique avec les fusées. Car après des négociations infructueuses sur l’élimination des missiles nucléaires, le Soviétique fait un pas vers le désarmement. Un geste que la Maison-Blanche accueille d’abord avec un optimisme prudent, mais qui ouvre la porte à un accord définitif, le traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, qui sera signé le 8 décembre 1987 à la Maison-Blanche par Reagan et Gorbatchev.
1er octobre 1988 – Gorbatchev fait le ménage au Kremlin

La session du Comité central du Parti communiste soviétique tenue à Moscou fin septembre a dû être agitée. En une heure, une série de dirigeants de la vieille garde ont été mis à la retraite. Le plus illustre: Andreï Andreïevitch Gromyko, 79 ans, symbole de l’ancienne diplomatie soviétique. D’autres conservateurs passent à la trappe, ce qui semble montrer que Mikhaïl Gorbatchev renforce considérablement sa position à la tête de l’URSS.
31 décembre 1988 – La turbulente classe de 1988

«Gorby» est bien entouré pour cette photo de classe des stars de l’actu en 1988. On y distingue notamment les seringues du sprinter américain Ben Johnson, les lunettes noires du général polonais Jaruzelski, les yeux «kôhlés» de Michael Jackson, le keffieh de Yasser Arafat, le long nez de Kurt Waldheim, le sourire de Jean-Pascal Delamuraz, la mitre du cardinal Lefebvre, les anneaux olympiques déchus de Paul-René Martin, la barbiche de Maurice Béjart, sans oublier le bonnet d’âne d’Elisabeth Kopp, dont le mari tente de se cacher.
30 novembre 1989 – La faucille et le goupillon

Le 29 novembre, Mikhaïl Gorbatchev débarque à Rome – sans la moindre division blindée mais avec son épouse Raïssa – pour une visite d’État de deux jours et demi prévue de longue date, mais plusieurs fois reportée. Les Romains lui font un triomphe. La rencontre bilatérale, elle, est quelque peu occultée par la poignée de main historique qu’échangent, au Vatican, l’hôte du Kremlin et Jean-Paul II, quelques heures à peine avant que ne débute un nouveau sommet américano-soviétique, à Malte cette fois-ci.
30 mai 1990 – Une défaite humiliante pour Gorbatchev

Mikhaïl Gorbatchev est dans un avion qui l’emmène en visite officielle au Canada, ce 29 mai 1990, lorsque son candidat pour le poste de président du Soviet suprême de la Fédération de Russie, Alexandre Vlassov, est battu par Boris Eltsine. L’enfant terrible de la perestroïka, devenu le critique le plus virulent de la politique menée au Kremlin, a réussi à rassembler 535 suffrages sur son nom, contre 467 à son adversaire lors de la réunion des députés du congrès de Russie. Des suffrages qui proviennent des rangs réformateurs, mais également des conservateurs qui expriment ainsi ouvertement leur défiance à l’égard du numéro un soviétique. À Moscou, «Gorby» est même hué par une foule brandissant le portrait du nouveau président. Burki, lui, s’amuse en faisant référence aux succès traditionnels des haltérophiles soviétiques.
16 octobre 1990 – Le couronnement de «Gorby»

Même si, en Russie, sa cote de popularité est plus basse que jamais, l’homme de la perestroïka et de la glasnost, de la décomposition du glacis soviétique, de l’émancipation des pays de l’Est et du désengagement des troupes soviétiques d’Afghanistan, Mikhaïl Sergueïevitch Gorbatchev est acclamé en Occident comme dans les anciens pays satellites de l’URSS. Mais avec le Prix Nobel de la paix 1990 pour «son rôle de premier plan dans le processus de paix qui caractérise aujourd’hui d’importants domaines de la communauté internationale», c’est d’une véritable apothéose qu’il faut parler. Sous le crayon inspiré de Burki, dans une magnifique évolution graphique, le marteau et la faucille symboles du communisme se font couronne de lauriers.
19 février 1991- Vers une «pax sovietica»?

En ce début d’année 1991, l’attention du monde est captée par la guerre du Golfe, qui oppose l’Irak à une coalition de 35 États dirigée par les États-Unis, à la suite de l’invasion du Koweït par les troupes de Saddam Hussein. Gorbatchev considère les Irakiens comme étant clairement les agresseurs et, du coup, s’attire à nouveau la colère des apparatchiks soviétiques, pour qui Hussein est un allié capital dans la région. Le 18 février, en pleine opération «Tempête du désert», à la veille d’une probable offensive terrestre, il propose aux Irakiens un plan de règlement de la crise. Mais il est trop tard. Devenant pasteur dans sa chaire, il prêche dans le désert, pour Burki.
24 décembre 1991 – L’âne et le bœuf revisités

La gloire du Prix Nobel est de courte durée. Pour Gorbatchev, 1991 est l’année de toutes les défaites. Les réformes qu’il a mises en œuvre ont provoqué sa déroute, la désagrégation du communisme et l’avènement de Boris Eltsine, le «nouveau tsar». Il quitte la direction du Parti communiste de l’Union soviétique le 24 août. «On a empoisonné l’air que je respire, on m’a humilié», affirme-t-il dans une interview. Le 25 décembre 1991, il démissionne de son poste de président de l’URSS, qui est dissoute le lendemain par le Soviet suprême.
N. B.: Les dates figurant au-dessus des dessins sont celles de leur parution dans «24 heures», pas celles des événements mentionnés.
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