Nouveauté littéraireÉric Holder et ses notes suaves
L’auteur de «La Belle jardinière» et de «Les Sentiers délicats» resurgit avec un recueil posthume de chroniques légères et bouleversantes.

En côtoyant les œuvres d’Eric Holder, il était aisé de saisir derrière ses personnages et leurs trames de quoi était fait son quotidien. Vivant dans une sorte d’exil volontaire, après avoir quitté la Seine-et-Marne pour s’établir dans le Médoc, l’auteur a voulu camper loin des agitations éditoriales parisiennes, des rivalités, des accointances et des mondanités. Au fil des saisons, il s’est mis à aimer sa terre d’adoption, le faisant savoir par ses écrits tout d’abord, ancrés dans les villages et leurs habitants parfois singuliers, dans les champs et les rivages qu’il fréquentait ou qu’il observait de loin. Et par ses gestes aussi, d’une cohérence implacable. Ainsi, lorsque l’indigence matérielle pointait son nez – ce qui se produisait assez souvent – l’écrivain délaissait la plume et se muait en ouvrier agricole, les manches retroussées au milieu des vignobles de la région.
Le ton d’un sage
Pour saisir davantage encore l’envergure de cette figure aussi humble que délicate, il faut plonger dans ce recueil de chroniques livrées entre 1996 et 2012 à la revue «Le Matricule des anges». On y redécouvre le ton d’un sage, qui savait observer d’un regard limpide les menues et grandes choses de son existence. On y côtoie aussi le style d’un orfèvre, qui pouvait restituer tout un monde en deux touches de plume. Tenez: «La France en janvier a des airs d’ancien film japonais»…
Disparu en janvier 2019 à l’âge de 57 ans, Eric Holder évoque ici la ruralité, les drames de sa vie – le décès de sa compagne, l’éditrice Delphine Montalant, quelques mois à peine avant son trépas –, ses rencontres et ses démons. Le récit de sa cure de désintoxication à l’alcool, défi majeur pour le grand amateur de liquides forts, étant probablement la plus savoureuse. Pour tout cela, Holder nous apparaît aujourd’hui encore tel un ami proche dont on continue de regretter la perte.
«L’Anachronique», d’Eric Holder, Le Dilettante, 283 p.
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