Expo: Ruta Jusionyte ou l'étrange sourire de la vie
Ses démons contenus, l'artiste lituanienne pose ses humanités sculptées sur la frontière avec l'espoir d'une vie meilleure et signe un retour plus serein à la Galerie Univers à Lausanne.

Ils n'ont pas d'âge mais un vécu, pas ou peu d'individualité mais l'expressivité d'une puissance intérieure. Le sexe? L'appartenance? Les croyances? Les êtres – personnages ne leur va pas – que Ruta Jusionyte essaime à la Galerie Univers à Lausanne n'en ont pas davantage… ou si peu lorsqu'il s'agit de sexe.
Ils sont libres. Invariablement nus et délivrés du poids des apparences. Libres de vivre et affranchis de toutes attaches terrestres dans une chaîne scellée par une solidarité silencieuse. Ces alphas, ces bêtas avancent parfois accompagnés d'un animal et souvent par deux ou par trois, le regard invariablement droit, comme magnétisé par le seul infini, et ils se posent, là, devant nous, avec pour argument la vie. La pleine vie.
Il y a quelques années, lors de la première exposition lausannoise de l'artiste lituanienne aujourd'hui établie à Paris, cette vie n'était encore que tourments et blessures. Née en 1978 dans un pays plombé et éteint par trois décennies de domination soviétique, Ruta Jusionyte a grandi dans la nécessité de dépasser l'horizon et dans l'urgence de trouver de nouveaux repères, un nouveau souffle, tout en reconnaissant la réalité d'une provenance, fût-elle difficile à vivre. Ses sculptures façonnées par un art de la résistance semblaient alors surgir d'un gouffre pour témoigner, le regard aussi frontal qu'un choc. «C'est un point final tout autant qu'une ouverture», soufflait alors l'artiste. Aujourd'hui, ce regard n'est plus qu'ouverture… Il ne fore pas le passé, il ne cille pas mais semble aspirer à quelque chose et laisse le reflet brillant d'une promesse le pénétrer.
«C'est que je cherche davantage le bon côté des choses et de l'existence. Je suis plus sereine, oui, et la résilience y est pour beaucoup: accepter, c'est s'extraire de l'histoire, c'est prendre conscience de la réalité et devenir plus libre», ose Ruta Jusionyte. Alors ses êtres osent aussi le rapport avec l'extérieur, avec l'autre, ils sont sortis de leur mutisme pour raconter et se raconter en petites saynètes comme autant de fables.
«J'aime travailler les ambiguïtés, les mutations, les hybridations parce que les rapports de force ont changé. Je le fais imprégnée de cet univers de la fable, de références mythologiques et psychologiques, et, au moment de créer, ces différentes sources fusionnent en moi et s'expriment à travers autant de métaphores», commente-t-elle. Il y a la sirène et l'homme, le couple et la carpe, la femme et le perroquet, le lapin et la femme. Tous ont en commun l'envie d'un partage, de se toucher, de se protéger, de s'envelopper dans une même tendresse universelle et tous semblent trouver une raison d'exister dans cette équité harmonieuse des règnes, des genres et des sexes. A chacun d'y insérer sa propre histoire mais sans oublier de sourire! Le leur faisant leur force, les êtres de Ruta Jusionyte, habités par la toute-puissance de la vie, sont là pour rappeler cet impératif.
Lausanne, Galerie Univers Jusqu'au me 3 mai, du lu au sa L'artiste sera présente ce vendredi (dès 16 h) et samedi (9 h-17 h)
Rens.: 021 312 85 42 www.galerieunivers.ch
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