«De la neige en plein été! Folie!» Au-delà du bon mot de l’artiste alémanique Jürg Halter, nous voici repartis pour un tour d’arguties au doigt mouillé (ou gelé) confrontant phénomènes météorologiques et changement climatique. On pensait que la science de l’attribution – discipline qui ramène les premiers au second – nous épargnerait le verglas de ces discussions absurdes où les climatosceptiques rivalisent d’imagination pour conforter un déni abyssal dont le bénéfice symbolique se présente sous la forme d’une planète «propre en ordre» à peine soumise à quelques petites variations annuelles… à défaut d’être saisonnières.
Bien avant de jeter votre sapin de Noël à la rue (et en le regrettant presque aussitôt devant la chute des flocons qui incitait plutôt à le rallumer), vous n’aviez que l’embarras du choix. Dénombrer par exemple dans les commentaires du site de «24 heures» les ayatollahs du ski qui, hilares devant les bouffées de chaleur de décembre, comptabilisaient déjà le nombre de leurs journées sur les pistes: le recordman de la latte précoce ou de la vantardise revancharde dénombrait déjà 11 expéditions sur les sommets, sans jamais oublier de rappeler le plaisir pris à se rendre en montagne au volant de sa voiture chérie…
En campagne, vous pouviez aussi très bien croiser des agriculteurs vaudois – le plus souvent sur un plateau en légère altitude – se réjouissant sans vergogne de ces nouvelles conditions d’exploitation reléguant au rang des souvenirs anciens les meurtrissures du gel. Sans aucune pensée pour les arboriculteurs valaisans luttant presque chaque année pour leurs abricots au printemps. L’égoïsme rend obtus, c’est connu.
«Il s’agirait désormais de glisser en crissant sur de fins rubans cartonneux filant au milieu de pentes au gris verdâtre.»
Il était également cocasse d’entendre divers responsables de stations de ski expliquer au peuple dépité et nostalgique de la magie des hivers de jadis que le grand remplacement restaurerait leurs souvenirs d’enfance enneigés. Il s’agirait désormais de glisser en crissant sur de fins rubans cartonneux filant au milieu de pentes au gris verdâtre. De nouveaux cheminements qui inciteraient à une plus grande maîtrise stylistique tant les sorties de route deviendraient désormais pénibles. Quant aux coûts écologiques et énergétiques que réclament les techniques de cette «neige de culture», les mêmes demeuraient souvent assez évasifs, sauf à dire que les rendements allaient en s’améliorant et que l’avenir, comme à son habitude, nous réservait en la matière de grands gisements de progrès.
Heureusement, la neige, la vraie, pas celle des trafiquants colombiens, est revenue recouvrir ces angoisses maladroitement dissimulées de son blanc manteau. Le déni reprend un joli coup de fart.
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Grain de sable – Fondus de neige
Les hivers d’antan sont-ils toujours à portée de main? J’ai un blanc bien profond.