LittératureHenriette Favez méritait bien un roman
«Le courage d’une imposture» nous emmène sur les traces de la Vaudoise devenue Enrique Faber, médecin à Cuba.

Au printemps 2022, une exposition au Palais de Rumine à Lausanne permettait de mieux faire connaissance avec la trajectoire exceptionnelle de la Vaudoise Henriette Favez, née à Lausanne ou Bavois en 1786. Se faisant passer pour un homme afin de pouvoir étudier la médecine, elle/il devient chirurgien militaire lors de la campagne de Russie menée par l’empereur Napoléon Ier.
Devenu Henri Favez (ou Faber), il s’installe en 1819 à Cuba, où son imposture est découverte quelques années plus tard, après son mariage avec une femme. Son procès et sa condamnation sont une des périodes les mieux connues de sa vie, puisque documentée par des actes officiels conservés aux archives de La Havane.
Restaient de nombreux blancs. Fort opportunément, mais par pure coïncidence, paraît cet été «Le courage d’une imposture», roman historique dans lequel les auteures françaises Geneviève Lefebvre et Marthe Marandola se sont attelées à combler ces blancs.
De la perte de ses parents à la fin de sa vie sous l’habit des sœurs de la Charité, c’est un long flash-back raconté par Henri/Henriette à un ancien compagnon d’armes de la campagne de Russie retrouvé au Mexique.
Dans une langue simple et agréable, Lefevbre et Marandola nous présentent son oncle, officier qui l’emmène dans sa caserne puis sur le champ de bataille. Elles lui inventent des camarades, des amies et des amis, et ce moment où il faut la déguiser en garçon afin que les soldats la laissent tranquille, ce moment où, sous les ciseaux du colonel, Henriette devient Henri, jeune conscrit arrivant tout droit de sa province.
Survie à la Bérézina
Historiquement, on ignore à peu près tout de la vie de la jeune femme durant les campagnes napoléoniennes, si ce n’est qu’elle épouse un officier, perd un bébé de huit jours, son mari ainsi que son oncle. La voie est donc libre pour imaginer ses pérégrinations poignantes et aventureuses, de Prusse à Moscou et Cuba, sa formation de chirurgien à l’École de santé de Paris, son statut d’élève et d’assistant du grand Dominique-Jean Larrey, chirurgien en chef de la Grande armée et pionnier en matière de soins aux blessés sur les champs de bataille. Et sa survie, à un cheveu près, sur la rive de la Bérézina.
Geneviève Lefevbre affirme qu’elle a attendu plus de trente ans, entre le moment de sa découverte de l’existence d’Henriette et la rédaction du roman. Elle a bien fait, l’ouvrage tombe au bon moment, dans cette époque où l’on redécouvre des parcours de femmes exceptionnelles restées dans l’ombre et où l’on s’interroge sur l’identité de genre.
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