Comme la plupart des Occidentaux, cela fait un an que les Vaudois ont véritablement découvert l’Ukraine. Ou plutôt ses femmes, ses hommes et ses enfants qui ont dû fuir leur patrie. Elles et ils sont 7000 à avoir été accueillis dans notre canton depuis, dont 1400 mineurs scolarisés. Plus de 1000 familles d’ici les ont nourris et hébergés. Derrière ces chiffres, il y a la générosité de beaucoup. Et la crainte qu’elle ne s’étiole, que, comme nous le raconte Svetlana, «cela devienne une guerre oubliée, comme la Syrie… Pour nous, c’est un chagrin quotidien.»
Qu’avons-nous «découvert» d’autre depuis 365 jours? Que des boucheries entre peuples continuent sur le sol européen; que le maître du Kremlin nous ment depuis si longtemps; qu’on assiste, en sus, au retour d’une «guerre froide», multipartite, terme inventé par un George Orwell décidément toujours aussi visionnaire. Mais aussi, qu’en Suisse, à la crise migratoire de l’Est s’en ajoutent tellement d’autres, que les réfugiés arrivent toujours d’ailleurs, que d’aucuns n’hésiteront pas à redire que «la barque est pleine». Pendant que d’autres ne s’émeuvent même pas que l’on retrouve des vers dans le riz servi dans un centre de requérants, rétorquant un «mais de quoi se plaignent-ils?»
«On ne bombarde pas celui avec qui on prétend souhaiter enterrer la hache de guerre.»
Pour revenir au front de l’Est, non, il n’est malheureusement pas possible – n’en déplaise à certains – de renvoyer dirigeants russes et ukrainiens dos à dos et de leur demander de se mettre à table pour discuter. Et cela tant que l’agresseur poutinien continue de pilonner un pays qui n’est pas le sien en réécrivant l’histoire pour se justifier. Aux va-t-en-paix, aussi vertueux soient-ils, il faut réexpliquer qu’on ne bombarde pas celui avec qui on prétend souhaiter enterrer la hache de guerre. Guerre qui est aussi la nôtre.
Que devons-nous encore apprendre? Qu’il ne faut pas, malgré les tentations, se laisser atteindre par la lassitude qui semble poindre dans les sondages. Surtout si cette dernière va de pair avec la désolidarisation. Ne te demande pas ce que la Suisse peut faire pour l’Ukraine, mais ce que tu peux faire pour celui qui est bien moins loti que toi et qui a dû quitter son pays, à son corps défendant. Et pour continuer à paraphraser John Fitzgerald Kennedy, «ich bin ein Ukrainer».
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Éditorial – Ich bin ein Ukrainer