Plus que Santos-Dumont, le pionnier de l’aviation. Plus qu’Oscar Niemeyer, l’architecte de l’utopie. Plus qu’Ayrton Senna, le pilote automobile, un dieu lui aussi resté vivant au pays. Plus que tous les politiciens, bien sûr, Edson Arantes do Nascimento, dit «Pelé», incarnait le Brésil.
Le Brésil de tous les excès. De toutes les passions. De toutes les folies. De tous les extrêmes. Le Brésil des différences aussi; différences de classes, de races. Dès ses premières apparitions sous le maillot «auriverde», il était devenu le chantre de la négritude. Par ses dribbles, il affolait les défenses adverses. Mais, plus important encore, il avait balayé d’un seul coup, grâce à de multiples feintes, les préjugés qui avaient été longtemps cultivés par l’élite blanche, exportatrice du football dans le pays.
Il était aussi le Brésil par son goût, parfois exagéré, de vouloir être au centre de toutes les attentions. César du ballon rond, il n’hésitait pas à parler de lui à la troisième personne. Et Dieu qu’il était encore Brésilien dans son machisme, dans cette vie privée mouvementée qui faisait le bonheur des gazettes; des gazettes qui, pourtant, n’ont jamais été méchantes avec lui.
Parce qu’on ne peut pas être méchant avec un dieu. Avec un roi. Autoproclamé, peut-être, mais adoré par tout son peuple. Un peuple nourri aux telenovelas – les feuilletons télévisés, l’opium du pauvre – qui aime tant se plonger dans le drame. Qui a les larmes faciles, mais toujours bien réelles, dans la joie comme dans la peine.
Pelé était «le» Brésil. Il l’est plus que jamais, en ce jour de deuil national. Et le sera toujours plus avec le temps qui, désormais, continuera sans lui. Vraiment? Non, parce que les légendes ne meurent jamais. Les dieux ne sont-ils pas éternels?
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Édito sur Pelé – Il était «le» Brésil
Pelé était bien plus qu’un footballeur de talent. Il était l’incarnation de son pays, de tous les excès, de toutes les passions.