PortraitIsabelle Caillat tombe le masque sur la RTS
On retrouve la comédienne genevoise dans le principal rôle féminin de la série «Cellule de crise» tournée par le réalisateur Jacob Berger. Rencontre.

Lorsque nous étions allés sur le tournage de «Cellule de crise», la série de Jacob Berger, nous avions brièvement croisé Isabelle Caillat, son actrice. Trop brièvement. En nous promettant de la rencontrer plus longuement lorsque la série serait programmée. Au vu des six épisodes, la promesse s’est muée en certitude. Aux côtés d’André Dussollier, le doute n’est pas permis. Isabelle Caillat tient les rênes de la fiction avec une fermeté que rien ne paraît ébranler. Dans le rôle de Suzanne Fontana, une femme de tête nommée présidente d’une des plus grandes agences humanitaires de la planète, héroïne plongée dans un monde à dominance nettement masculine, elle impose une autorité et un charisme tout ce qu’il y a de plus naturel.
Pour la rencontrer, faute de bistrots où s’attabler, nous la retrouvons dans un bâtiment universitaire où nous pouvons nous fondre comme deux étudiants que nous ne sommes plus. Isabelle Caillat tombe rapidement le masque, au propre comme au figuré. «Je n’ai pas encore le recul pour juger le rôle – et j’avoue même un petit stress à l’approche de la diffusion de la série –, mais je n’ai pas eu l’impression que Suzanne était perdue dans un monde d’hommes. J’avais même beaucoup de partenaires femmes. De toute façon, mon personnage refuse de se placer dans ce genre de dialectique hommes-femmes.»
Trac plus violent qu’au théâtre
Pour aborder un si long tournage, la comédienne genevoise, qui est née à New York mais a grandi à Genève, avait une certaine appréhension. «Et même un trac assez puissant, plaisante-t-elle. Plus violent qu’au théâtre, même, parce qu’il s’agit de s’exposer entièrement. En revanche, je n’avais pas la crainte de mes partenaires. Je me sentais en confiance et on s’était tous vus avant. J’aurais pu être impressionnée par André Dussollier, c’est vrai. Mais mes craintes étaient plus de ne pas correspondre et de ne pas tenir la pression. Paradoxalement, le rythme de tournage effréné d’une série aide beaucoup. Sur un film, on a plus de temps.»
Au niveau du casting, Isabelle Caillat a passé des essais avant d’être engagée. «J’ai été appelée par une directrice de casting puis ai reçu pas mal d’éléments par courriel. Des séquences, un synopsis. J’ai eu des échanges de mail avec Jacob Berger. J’avais déjà travaillé avec lui sur «1 journée», qui était ma première expérience. Au casting, j’ai décidé de faire des choix audacieux. Il y avait d’autres comédiens qui me donnaient la réplique et Jacob a pris le temps de travailler avec nous. À la fin du casting, je suis partie sans regrets. Sans me dire, à propos du rôle, «je l’ai» ou «je ne l’ai pas». J’ai reçu la bonne nouvelle un mois et demi après.»
Récompensée par un Quartz
Atypique lui aussi, le parcours professionnel de l’actrice mérite qu’on s’y attarde. Si elle a fait son cursus normal à Genève, elle a décidé de repartir à New York pour étudier la comédie. «J’y ai séjourné de 2001 à 2005. Tant que tout allait bien, j’ai adoré cette ville. Puis lorsque les choses ont commencé à boiter, notamment du côté sentimental, je me suis rendu compte qu’il était peut-être temps de revenir. Pour s’en sortir là-bas, il faut une énergie incroyable. Le danger d’y ramer toute sa vie était réel.» D’où un retour à Genève qui va lui permettre de s’orienter vers du théâtre et un cinéma d’auteur qu’elle aimerait bien élargir. En 2011, elle a d’ailleurs remporté un Quartz de meilleure actrice pour l’excellent «All That Remains» de Valentin Rotelli et Pierre-Adrian Irlé.
«J’aimerais faire plus de films. J’ai souvent pris ce qu’on me proposait, sans avoir l’embarras du choix. Mais en Suisse, je dois reconnaître que c’est avant tout le théâtre qui permet aux comédiens de vivre. Même si entre un tournage et une pièce, je choisis le premier. Chez Suzanne, l’héroïne de «Cellule de crise», je retrouve de moi une forme d’idéalisme que j’assume pourtant moins qu’elle. Elle a aussi comme moi le goût de la réflexion.»
Son désir de jouer, Isabelle Caillat en a eu le déclic vers l’âge de 15 ou 16 ans. «Je prenais des cours de théâtre avec Claude Delon. J’étais alors très timide, mais les moments où je me sentais le mieux dans ma vie, c’était durant ces cours.» Peut-elle tout jouer pour autant? «Non, les choses trop physiques me sont impossibles. Et j’avoue que les scènes d’amour, je ne m’en sens pas capable. Je ne suis pas à l’aise avec la nudité. Et je n’ai jamais joué quelque chose à l’envers de mes convictions profondes. Ce métier n’est pas facile mais je le trouve très gratifiant. Je ne me suis jamais sentie coincée dans un truc, rôle, film ou pièce, que je ne sentais pas. Ma voix a été un problème durant longtemps, mais l’école de théâtre m’a libérée.»
«Cellule de crise», jeudi 3 déc., 21h10, RTS 1
Lire également notre page «Paroles paroles» du samedi 28 novembre consacrée à Jacob Berger.
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