Karim Slama survit plutôt très bien à ses multiples crises de la quarantaine
Le comique lausannois a tourné la page Titeuf et fourmille d'idées et de projets. Son prochain one-man-show devrait être un spectacle son et lumière!

C'est un Karim Slama tout joyeux qui débarque sur la terrasse d'un café branché dans le quartier sous-gare de Lausanne où il a ses habitudes. Malgré les soucis – il vient de s'apercevoir que son site Internet a été piraté – ses yeux bleus gardent leur lueur rieuse et fixent l'avenir avec curiosité et détermination.
Vous affichez votre habituel crâne rasé. La mèche rebelle de Titeuf vous manque-t-elle?
C'est l'envergure d'un tel projet qui me manque, même si cette aventure n'est pas tout à fait terminée, puisqu'on travaille sur le DVD qui devrait sortir pour Noël. Comme nous n'avons pas obtenu les droits pour la France, les représentations sont finies. J'y ai laissé quelques sous et beaucoup d'énergie, mais je suis heureux. Je me rends compte que 56 représentations en Suisse romande, c'est quelque chose d'assez miraculeux!
Difficile de tourner la page? De retourner à vos «moutons»?
J'ai toujours plein de projets en route, mais c'est clair que j'ai connu une période un peu difficile après Titeuf. C'était un projet de taille, puisqu'il occupait 40 personnes. Depuis deux semaines, j'ai de nouveau l'envie d'avancer. Il y a l'hommage à François Silvant, que nous jouons avec huit autres humoristes, qui passe par Morges-sous-Rire le 21 juin et que nous reprendrons à la rentrée. Là, je remonte aussi sur scène seul, avec la formule Sur-mesure, où le public choisit parmi 36 sketches. C'est vraiment sympa à jouer, parce que ce n'est jamais la même chose, même si certains numéros sont systématiquement choisis.
Techniquement, on arrive à programmer l'éclairage de chaque sketch à l'avance, ça va vite, ça roule et je me rends compte qu'aucun n'a pris une ride. C'est plaisant et rassurant. Le public joue le jeu et aime ça. Certains spectateurs sont revenus trois fois. Et c'est le genre de show que l'on peut aussi adapter à des soirées privées. C'est le parfait mariage entre l'impro et le très préparé. Les liaisons ne sont jamais les mêmes. Je fais comme je veux et comme ils veulent. Et je prends tellement de plaisir que je ne peux pas me résoudre à éteindre cette formule. Je rejoue aussi quelques fois Globalement, ça va plutôt bien.
Quinze ans de carrière, c'est pas mal de fiertés, non?
Ça passe surtout sacrément vite! Je sais que chaque jour je suis plus sévère avec moi-même, plus exigeant. Plus qu'avoir réussi à faire rire outre-Sarine, je crois que la chose dont je suis le plus fier a été mon tout premier one-man-show. Je venais du monde de l'impro, j'étais naïf. Il avait fallu sortir plusieurs dizaines de milliers de francs, surtout pour la technique, en bossant à côté comme ingénieur. Ce n'était pas rien. Mais, plutôt que de regarder en arrière et de se rendre compte à quel point le monde de l'humour a changé du tout au tout, je préfère me concentrer sur la suite. Je vise un prochain spectacle solo pour 2018. Je pense qu'il sera sans paroles si j'y arrive.
Mais aujourd'hui je suis désireux de porter un projet qui me dépasse, de vraiment développer la troupe et de si possible sortir une création par année dans des domaines très variés. J'aimerais aussi pouvoir écrire des récits où je défends certains thèmes, dont l'humour serait le vecteur, la porte d'entrée. Dans une réalité où YouTube est très présent, le spectacle vivant reste un challenge. Il faut espérer que le public continuera à se déplacer.
Vous êtes clairement à un tournant. Une petite crise de la quarantaine?
Touché! Professionnellement, j'en fais une à chaque fois que je termine une création. J'ai fait le choix d'être indépendant, mais j'ai toujours la trouille de ne pas avoir de boulot. Mes projets sont souvent à moyen ou long terme et il faut sans cesse trouver un équilibre financier. Je travaille donc mon réseau sans relâche et je suis en train de m'entourer au niveau administratif. Je pensais que Titeuf, le pestacle allait susciter des jalousies, mais ça a été tout le contraire. Un soutien unanime de tous, de la profession jusqu'au public en passant par la presse. C'était un défi énorme, mais le Bélier que je suis s'est borné à le relever! Dans le privé, la crise de la quarantaine est derrière moi. La famille recomposée risque de faire partie des thèmes de mon prochain spectacle…
Pensez-vous avoir trouvé votre niche?
Ah non, jamais! Par ici, il n'y a guère que l'équipe de 26 minutes qui ait sa niche, et elle est tellement spacieuse qu'ils peuvent se lâcher, se faire plaisir. Je ne suis pas du tout dans cette dimension. Moi, je cherche à me rapprocher du théâtre avec un vernis humoristique. Ce sont les émotions qui sont mon moteur.
Vous avez été un ado très libre, êtes-vous pareil à votre père avec vos trois fils?
C'est vrai que j'ai pu partir en vacances avec des potes à l'âge de 15 ans. Mon père, qui est décédé il y a deux ans, était un utopiste, qui avait de grands rêves pour son fils. Il aurait aimé que je retourne en Tunisie, mettre des panneaux solaires un peu partout… Je pense être plus présent que lui au quotidien, mais je suis aussi plus cadrant. Je dresse les limites et, à l'intérieur de celles-ci, mes fils sont libres et autonomes.
Parmi vos autres occupations, vous citez souvent la cuisine et le volleyball…
Je suis un piètre coéquipier parce que je ne suis pas souvent là, mais le volley, c'est mon lien social. De part et d'autre du filet, il y a des joueurs de toutes les couleurs de peau et de toutes les couleurs politiques, et ça fait du bien. Politiquement, je ne me suis jamais affiché. Je ne désire pas mêler cela à mes spectacles. Mais cela ne m'empêchera pas d'aller défendre une cause qui m'est chère, d'utiliser mon image pour lutter contre le racisme par exemple.
Je cite aussi la cuisine car j'aime relever des défis. M'attaquer seul à la préparation d'un plat, pour ensuite le partager. Actuellement, on est sept à la maison: cuisiner est plutôt une source de stress. En fait, je me rends compte que je suis plus stressé par ma vie familiale que par mon job. Même si ce cocon me permet aussi de me retrouver, de rire de mes soucis, de trouver un certain équilibre. Vous savez, dans les médias en ce moment, on parle beaucoup de «charge mentale», ce fardeau que trimballent surtout les femmes chargées de tout organiser. Les horaires, les courses, la maison, les enfants, les activités, les vacances. Eh bien, je comprends tout à fait ce qu'elles ressentent! Mon stress naît de toutes ces responsabilités et de l'exigence constante que j'ai envers moi-même.
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