Les Chinois manifestent. Jusqu’à tout récemment, cette phrase pouvait paraître incongrue. Depuis ce week-end, elle ne l’est plus. Un vent de contestation s’est levé dans tout le pays, où une vingtaine de métropoles ont vu des foules défier la politique «zéro Covid» du régime, appelant même à la démission du président Xi Jinping.
Voilà qui ne colle guère à l’image que l’on s’était faite d’une population chinoise parfaitement muselée depuis la répression sanglante des manifestations sur la place Tian’anmen en 1989. À l’époque, le régime avait sorti les matraques pour réduire à néant tout espoir de changement. Aujourd’hui, il est sans doute prêt à en faire autant.
Mais la Chine est en réalité en perpétuelle tension, depuis des années, bien avant le début de la pandémie de Covid. Des manifestations, il y en a tous les jours, quelque part dans le pays. Contre la pollution d’un quartier, la corruption des autorités locales, les violences policières… Souvent, la contestation prend fin sans trop de résistance. Parfois, Pékin sanctionne des responsables régionaux. Jamais, cependant, le régime ne se sent vulnérable. Cette fois-ci, par contre, la dimension nationale de la grogne et les slogans dirigés contre Xi Jinping peuvent commencer à inquiéter en haut lieu.
Et pour cause. Entre le régime communiste et la société chinoise, le «contrat social» est rompu. Au cours des dernières décennies, le Parti unique a tiré une forme de légitimité en apportant prospérité et sécurité à une population dont les perspectives d’avenir ne cessaient de croître. Les masses sont sorties de la misère à une vitesse folle, chaque génération vivant beaucoup mieux que la précédente. Mais voilà, ce modèle-là s’est essoufflé. Sous le couvercle de la censure, la Chine est en ébullition.
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Éditorial – La Chine en ébullition
Derrière le ras-le-bol d’une politique «zéro Covid» désespérante, s’exprime l’impatience d’une société sans perspectives d’avenir.