
Il n’a pas dit son nom. Encore moins son prénom. Tout juste sait-on qu’il vient du Sud. Son accent provençal l’atteste. C’est la Coupe du monde qui l’a amené au Qatar, indirectement. Il y bosse depuis quelques semaines pour une entreprise impliquée dans l’organisation. Le foot? Il s’en cogne, comprend-on assez vite. Il n’ira pas voir de match, mais il profite de l’effervescence à sa manière. Le Qatar, il adore. «Les filles sont faciles, il faut juste les payer», balance-t-il assez vite, accoudé au bar, avant de sauter sur l’offre spéciale du soir: une bouteille d’alcool fort à un prix un peu plus abordable que d’habitude.
Rencontre furtive. Ce soir-là, on se prend à découvrir le bar de l’hôtel dans lequel on loge. On nous a vendu un pub, on se retrouve dans une espèce de bar dansant où se côtoient une chanteuse de R’n’B en représentation toute la soirée, avec les haut-parleurs crachant son flow dans l’ensemble de la salle, deux tables de billard, une fumée stagnante en raison des paquets de clopes grillés à la chaîne et surtout un alcool qui coule à flots.
L’endroit est bondé. C’est donc ça la cour des vices. Tout ce que le Qatar proscrit et préférerait cacher est réuni dans un de ces bars d’hôtel, qui détient la licence pour vendre de l’alcool. Ceux qui sont là ne sont pas venus pour autre chose. Ce sont des expats. Et ils viennent de partout. Quelques Européens, mais surtout pas mal de personnes originaires du sous-continent indien. La plupart ne logent pas à l’hôtel susmentionné. À l’entrée de celui-ci, vous êtes accueillis et dirigés vers l’ascenseur. Un préposé se charge même de presser le bouton pour rejoindre le bon étage.
On ne se fait pas prendre au hasard, donc. Et pour tout dire, il faut un certain budget, l’alcool et les cigarettes étant taxés à 100%. La pinte d’une bière connue à l’international revient à 10 francs. Pour la cuite, c’est donc une forme d’investissement. Libre à chacun d’y placer ses ronds.
Reste que forcément, le jour où le Qatar a choisi de bannir complètement l’alcool des enceintes, il est difficile de ne pas y voir une petite forme d’hypocrisie. Faites ce que vous voulez, mais faites-le cachés.
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Mirages – Chronique du Qatar – La cour des vices, nichée dans les hôtels
Le Qatar bannit l’alcool des stades pendant la Coupe du monde. Mais il est possible d’en trouver ailleurs.