Disparités entre femmes et hommes«La pandémie est un pas en arrière en matière d’égalité»
La spécialiste Marieke Voorpostel explique que le Covid-19 a «creusé le fossé» en frappant plus durement les femmes, au travail comme en privé.

Depuis 1999, le centre de compétences suisse en sciences sociales (FORS) explore la réalité de milliers de ménages du pays à travers l’étude «Vivre en Suisse». L’an dernier, un volet spécial a été lancé afin d’évaluer les impacts de la pandémie sur les foyers et notamment sur l’égalité entre femmes et hommes. Ses résultats seront présentés mardi 16 novembre en ouverture d’une soirée débat organisée par le Bureau de l’égalité entre les femmes et les hommes de l’État de Vaud, à Lausanne (inscription obligatoire jusqu’au 11 novembre). Responsable de recherche au FORS, Marieke Voorpostel dévoile quelques orientations.

Qu’avez-vous constaté?
Comme beaucoup d’études, nous arrivons à la conclusion que les femmes ont été davantage touchées que les hommes par la crise sanitaire. Ça concerne le travail rémunéré comme non rémunéré. Leur situation professionnelle s’est plus facilement détériorée tandis que leur implication dans la sphère privée s’est encore accentuée. Pour certaines, c’était une situation ponctuelle, mais d’autres n’ont toujours pas rattrapé ce pas en arrière en matière d’égalité.
Parvenez-vous à quantifier ce «pas en arrière»?
Il y a de nombreux indicateurs. Le taux de chômage a plus augmenté chez les femmes, surtout chez celles qui ont un niveau de formation bas. Entre fin 2019 et le printemps 2020, 8% des femmes ont arrêté de travailler contre 5% chez les hommes. Par contre, elles ont mieux repris après le semi-confinement. Nous avons aussi l’impression que le chômage partiel a mieux protégé l’emploi des hommes mais c’est à confirmer. Ces derniers avaient souvent plus de possibilités de télétravail, ce qui est lié aux secteurs dans lesquels ils exercent. Les domaines les plus durement touchés, comme le commerce, sont ceux où les femmes sont surreprésentées. C’est aussi vrai pour les domaines les plus exposés, comme les soins. Mis bout à bout, ça fait beaucoup de handicaps.
«La situation professionnelle des femmes s’est plus facilement détériorée tandis que leur implication dans la sphère privée s’est encore accentuée. Certaines n’ont toujours pas rattrapé ce pas en arrière en matière d’égalité.»
Qu’en est-il du travail non rémunéré?
Les femmes ont moins travaillé dans le cadre professionnel, donc pour un salaire, et encore plus travaillé dans le cadre privé, c’est-à-dire à la maison. Le fossé s’est donc creusé. Nous constatons aussi que ce travail non rémunéré est mieux partagé quand les partenaires ont une situation professionnelle égale. Pendant le semi-confinement, pour deux emplois à temps plein, le temps de garde journalier des enfants par les hommes est passé de 5 h à 14 h. Quand les deux sont à temps partiel, il a augmenté de 5 h. Par contre, quand l’homme est à temps plein et la femme à temps partiel, il n’a augmenté que d’une heure.
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