En 2011, les architectes barcelonais Fabrizio Barozzi et Alberto Veiga, qui venaient de gagner le concours d’architecture du Musée cantonal des beaux-arts et du site afférent, nous assuraient que, dans leur projet, «un point très important a été de ne pas considérer ce site comme une collection de bâtiments, mais de comprendre qu’il s’agissait d’un complexe de trois constructions délimitant un espace public, urbain, qui doit s’améliorer à chaque étape et doit devenir un nouveau centre».
Dix ans plus tard, c’est un autre duo d’architectes qui s’érige sur
le site lausannois. Six ans après avoir remporté le concours pour trouver une place au musée de l’Élysée et au Mudac, les Portugais Manuel et Francisco Aires Mateus peuvent enfin contempler leur création achevée – la cérémonie de remise des clefs a lieu jeudi prochain et des journées portes ouvertes le week-end. Une création qui voit double puisque leur bâtiment abrite les deux musées que prévoyait le projet qualifié jadis de «Pôle muséal».
Même si une troisième construction devrait bien voir le jour avec l’agrandissement et la rénovation du poste directeur, les Espagnols ne se sont toutefois pas vraiment trompés, car l’édifice d’Aires Mateus, par un tour de force technique qu’ils doivent aussi à leur collègue ingénieur Rui Furtado, ont distinctement délimité les deux musées, qui, dans leur construction, ne se touchent que par trois points de contact, créant un foyer vitré, ouvert à la lumière et aux visiteurs, entre les deux entités. Au Mudac, l’étage et la lumière pour faire briller l’industrie. À l’Élysée, un sous-sol à la pénombre propice aux collections argentiques.
L’usage d’un monde
Peu importe le nombre d’édifices, le site de Plateforme10 est désormais complet dans ses grandes lignes de force et il devient possible de mesurer l’ambition de Barozzi-Veiga à l’aune des concrétisations d’Aires Mateus. Quelle dynamique insuffle le nouveau bâtiment dans ce qui a été pensé comme un nouveau quartier du chef-lieu lausannois? L’accès par l’ouest gagnera-t-il le cœur des piétons et des vélos? Les escaliers extérieurs qui mènent au nord et à l’avenue Ruchonnet seront-ils empruntés aussi facilement par les promeneurs qui viendront en sens inverse? La place et sa perspective dégagée va-t-elle magnétiser le passant depuis la gare?
Ces questions trouveront évidemment des réponses à l’usage avec, à l’horizon, les limites que le chantier des CFF instaurera pendant encore de nombreuses années. Mais l’inscription urbaine ne se fera pas sur les seuls termes de l’architecture. Désormais corps constitué par son bâti, Plateforme10 va bientôt devoir ouvrir un tout autre chantier, celui de ses contenus et donc de son public. L’outil paraît remarquable, les canaux sont prêts, reste à les irriguer du sang de la création et de l’événement. Une énergie à polariser.
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Commentaire – La pierre de touche de Plateforme10
Le bâtiment du Mudac et de Photo Élysée, du bureau Aires Mateus, se dévoile au gré d’une intervention de Christian Marclay.