Loi sur le terrorismeLa politique étrangère de la Suisse est en jeu
Une analyse du groupe de réflexion foraus souligne que l’adoption de la loi sur le terrorisme remettrait en question le rôle de défenseur des droits humains joué par notre pays.

Si la loi contre le terrorisme soumise en votation le 13 juin devait être adoptée, elle aurait des conséquences durables pour la Suisse en matière de politique étrangère et remettrait en question son rôle de défenseur des droits humains. C’est le constat de la dernière publication du groupe de réflexion foraus, diffusée mardi.
Alors que le débat sur le référendum se concentre principalement sur l’impact national de la loi, les auteures du foraus analysent le texte dans un contexte global. Nora Naji et Darja Schildknecht évaluent notamment les conséquences de politique étrangère qui résulteraient de son adoption.
Les auteures inscrivent la «Loi fédérale sur les mesures policières de lutte contre le terrorisme» (MPT) soumise au vote dans la tendance internationale à renforcer le caractère préventif de la lutte globale contre le terrorisme.
Problème de proportionnalité
Pour elles, le renforcement du pilier préventif dans la lutte suisse contre le terrorisme est particulièrement problématique sous l’angle de la proportionnalité. En tentant de combler le vide entre le soupçon policier de menace et le soupçon initial légal, la loi nourrit l’illusion d’une sécurité absolue.
Par ailleurs, «l’expansion de la sécurité nationale au détriment de la liberté a des conséquences évidentes pour la Suisse en matière de politique étrangère. Ces conséquences n’ont été que trop peu prises en compte jusqu’à présent», estime Darja Schildknecht, citée dans un communiqué.
Droits fondamentaux
Dans la stratégie suisse de lutte contre le terrorisme, la préservation des droits fondamentaux et des droits humains occupe une place centrale. Comme la police serait désormais en mesure de prendre des mesures préventives à l’encontre de personnes potentiellement dangereuses sans qu’elles n’aient commis de délit, elle irait à l’encontre des droits fondamentaux et des droits humains tels que le droit au respect de la vie privée ou à l’éducation.
La violation de ce dernier ne serait pas compatible avec la Convention des Nations unies sur les droits de l’enfant, qui s’applique aux enfants et aux jeunes à partir de respectivement 12 et 15 ans. Le rôle de la Suisse en tant que défenseure des droits humains serait ainsi remis en question, disent les auteures.
Une alternative à la loi
Comme alternative, celles-ci présentent des recommandations d’action afin de renforcer la lutte préventive contre le terrorisme avec les institutions et les structures existantes, mais sans générer de dommages collatéraux pour la politique étrangère.
Elles appellent ainsi à un renforcement de la coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme, à un renforcement de la coopération policière internationale et à une application des normes internationales aux organes de police nationaux et cantonaux.
Quelles valeurs pour la Suisse ?
«Outre la votation du 13 juin, la question légitime se pose de savoir sur quelles valeurs la Suisse souhaite s’appuyer à l’avenir pour affirmer son influence sur la scène internationale. Cela est d’autant plus vrai dans la perspective de la candidature de la Suisse au Conseil de sécurité de l’ONU en 2023/24», conclut Nora Naji.
ATS
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