«En tout cas, les jeunes qui se lancent dans ce métier, ils ont bien du courage. Moi, je vais essayer de tenir les années qu’il me reste jusqu’à la retraite, mais ce sera un sacré soulagement de s’arrêter.»
Sous la tonnelle de la fête de Jeunesse se déroulant ces jours à Penthéréaz, les agriculteurs n’ont pas le cœur à fêter. La sécheresse qui les oblige à abattre une partie de leurs bêtes est une sorte de coup de grâce pour ces passionnés de plus en plus dépités.
Il y a de quoi. Depuis quelques années, le nombre de bâtons se glissant dans les roues de leurs tracteurs ne fait qu’augmenter: changements de philosophie politique, concurrence étrangère déloyale, votations agressives, retour du loup, et donc, désormais, sécheresse ravageuse.
Mais le pire pour eux est, sans aucun doute, ce sentiment d’isolement face à une population qui semble ne plus les comprendre. «Les gens ne se rendent absolument pas compte de ce qu’est notre vie», constatait une agricultrice sous cette même tonnelle.
«On passe notre temps à s’adapter, à s’améliorer, notamment en faveur de l’environnement. Mais on nous considère toujours comme des grands pollueurs, voire des profiteurs. Pourtant, quand il y a des augmentations de prix dans les magasins, ce n’est jamais nous qui en voyons la couleur.»
Le jeu est dangereux. D’abord parce qu’aux dernières nouvelles, on ne nourrit pas une famille avec deux plants de tomates poussant sur un balcon. Et puis parce que, humainement, il y a une limite à la capacité de résistance. L’engrenage rappelle celui qui avait incité le Canton à créer en 2016 un poste d’aumônier du monde paysan pour prévenir les suicides.
Dans une interview publiée dans nos colonnes en juin dernier, le président de Prométerre, Claude Baehler, proposait pourtant une alternative beaucoup moins douloureuse: «Tout ce qu’on demande, c’est un peu de reconnaissance et de confiance en nos compétences.»
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Éditorial – La résilience des paysans atteint ses limites