Alain Berset a-t-il incité son porte-parole à établir une ligne directe avec «Blick», dans le but de favoriser une couverture bienveillante de la gestion de la crise sanitaire? Le ministre de la Santé, héros national de la lutte contre le Covid, affirme n’avoir rien su de ces fuites. S’il s’avère qu’il a menti à ses collègues du Conseil fédéral, ainsi qu’à tout le pays, il en paiera le prix. Peut-être.
Les commissions de gestion et les trois procureurs chargés des différents aspects de l’enquête doivent tout faire pour démêler le vrai du faux. Il est très problématique que des informations confidentielles d’un département parviennent à la presse avant qu’elles ne soient sur la table du Conseil fédéral.
À mon sens, il y a cependant une conclusion qu’il faut se garder de tirer aujourd’hui. Celle qui bruisse sur les réseaux sociaux et dans les sphères coronasceptiques: les décisions du Conseil fédéral auraient été moins strictes si les médias – «Blick» en premier lieu – avaient été plus sévères avec le gouvernement. Nous aurions donc été plus libres de nos mouvements et le pays s’en serait mieux porté.
«Il faudrait pouvoir expliquer aux citoyens chinois ce que nous avons vécu et comparer cette épreuve avec celle qu’ils ont traversée, non?»
Personnellement, je peine à croire que les sept Sages aient été influencés par les révélations médiatiques, le mercredi matin, pour prendre leurs décisions. Mais surtout, même au plus fort de la pandémie, nous avons bénéficié de libertés que les pays voisins nous ont enviées. Notamment celle de sortir dans la rue comme bon nous semblait – en prenant les précautions d’usage. Rappelez-vous que nos voisins français devaient justifier leurs déplacements au moyen d’un formulaire officiel…
Autre exemple éloquent: les stations suisses de sports d’hiver sont restées ouvertes durant tout l’hiver 2020-2021. Quant au certificat Covid, qui a fait hurler les sonneurs de cloches et autres militants antivaccins, c’est une mesure qui a été adoptée partout. Et qui ne nous a pas empêchés de vivre.
En d’autres termes, Alain Berset et ses collègues n’ont pas mis la Suisse dans un carcan pendant deux ans. Il faudrait pouvoir expliquer aux citoyens chinois ce que nous avons vécu et comparer cette épreuve avec celle qu’ils ont traversée, non?
Décès et séquelles graves
Deuxièmement, le Covid n’était pas une «grippette» passagère. Selon les chiffres officiels, plus de 14’000 personnes en sont mortes dans notre pays. D’autres, très nombreuses, subissent encore les séquelles de la maladie. Nous avons toutes et tous pu le constater autour de nous. Je parlais l’autre jour avec une dame qui me racontait que son mari, septuagénaire, avait frôlé la mort à l’hôpital. Deux mois de coma, des dialyses régulières et délicates, une famille entière plongée dans l’angoisse. Puis la renaissance, chance que tant d’autres n’ont pas eue.
C’est la vaccination qui a permis à la Suisse de voir le bout du tunnel. L’action politique, les semi-confinements, l’engagement sans faille du corps médical. Pas la mansuétude de «Blick» envers Alain Berset.
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La rédaction – La Suisse a surmonté le Covid sans l’aide de «Blick»
L’affaire de fuites qui met Alain Berset sous pression ne doit pas faire oublier l’essentiel: une action politique mesurée et la vaccination ont payé.