Il y a un peu plus de trente ans, le 26 décembre 1991, l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) était dissoute. Les pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie) échappèrent définitivement à l’influence russe alors que douze autres États – l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Biélorussie, la Géorgie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, la Moldavie, la Russie, le Tadjikistan, le Turkménistan, l’ Ouzbékistan et l’Ukraine – obtinrent leur indépendance tout en restant en étroite relation avec Moscou. Comment ces pays ont-ils évolué? Comment mesurer les progrès économiques et politiques?
Marek Dabrowski, professeur invité à l’Université d’Europe centrale de Vienne et ancien premier vice-ministre des Finances sous le premier gouvernement postcommuniste de la Pologne, tente d’y répondre dans un ouvrage publié sous les auspices du laboratoire d’idée Bruegel (Bruxelles). L’auteur, une référence incontestée dans l’analyse des pays de l’ex-URSS, retrace les grandes étapes de trois décennies marquées par l’effondrement économique d’un système en faillite et décrit le processus de réformes qui n’ont jamais été menées jusqu’à leur terme, à l’exception notoire de celles menées par les trois pays baltes qui ont adhéré rapidement à l’Union européenne (2004). Grosso modo, on peut diviser la période en deux phases distinctes. La première (l’éclatement de l’URSS) voit les pays régresser au plan économique, perdre jusqu’à la moitié de leur richesse, être sous la pression d’une inflation galopante et de pénuries chroniques. Mais, à de rares exceptions, la roue de la fortune tourne; les réformes politiques qui démarrent à Moscou gagnent les autres républiques. Le monde est loin d’être parfait mais les États semblent avoir retrouvé une assise économique.
Reste que les équilibres sont fragiles. Les pays en transition ressentent très durement les crises financières, la baisse parfois dramatique des cours des matières premières. De tous les États, l’Ukraine est de loin le pays qui va le plus mal. Kiev n’a presque pas connu de croissance en trente ans! La corruption y est endémique; les réformes économiques et politiques sans cesse remises à plus tard. Pour Marek Dabrowski, les interférences incessantes de la Russie dans les affaires de l’Ukraine en sont la cause majeure. Moscou a bien tenté de créer une zone de libre-échange avec ses voisins mais cela n’a jamais véritablement fonctionné; les conflits régionaux liés aux intérêts russes ont fait échouer les plans d’intégration (conflits dans le Caucase, en Moldavie, etc.).
Les progrès dans les réformes économiques et politiques sont stoppés dès le second mandat de Vladimir Poutine (2004). En 2008, c’est l’invasion de la Géorgie, suivie par la crise avec l’Ukraine (la révolution orange de 2014) alors même que la Géorgie, l’Ukraine et la Moldavie cherchaient à se rapprocher de l’Union européenne. On pourrait croire que les crises financières et la chute des prix du pétrole (2008) ont contribué aux difficultés des anciennes républiques soviétiques. Pour Marek Dabrowski, cette analyse est trop simple. C’est l’absence de vraies réformes qui est à l’origine des malheurs économiques et politiques des anciennes républiques et non l’inverse, comme le montre a contrario la réussite des pays baltes, les réels progrès de la Géorgie ou de l’Arménie. À l’inverse, la Biélorussie et l’Ukraine ont suivi l’exemple de Moscou, donnant des signes d’ouverture politique avant de sombrer dans des régimes autoritaires. L’avenir de l’Ukraine et de la Moldavie? Il est lié à la promesse de rejoindre l’UE. Pour tous les autres, l’horizon s’annonce sombre; ils sont trop petits et liés à un changement de politique de Moscou.
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La chronique économique – L’avenir sombre des pays liés à la Russie
Les anciennes républiques soviétiques, comme l’Ukraine, n’ont pas réussi à se réformer, à l’exception notoire des pays baltes. Pourquoi?