Le chantier naval qui a plu aux défenseurs de Lavaux
Mis à l'enquête en pleine campagne «Sauver Lavaux III», le chantier de Moratel implanté sur des vignes a convaincu chez Franz Weber.
Le bâtiment tout en bois signé Localarchitecture a fière allure à l'entrée du port de Cully. On en oublierait carrément qu'il a poussé sur une parcelle encore recouverte de vignes au printemps 2018. Il abrite le nouveau Chantier naval de Moratel (CNDM) inauguré fin septembre par son patron, Yves Estermann.
La nouvelle entreprise est une émanation de celle de Daniel Voruz, concepteur des mythiques voiliers lémaniques Jeudi 12, installée durant quarante ans tout à l'ouest du plateau de la gare. En 2012, au gré du réaménagement de cette zone semi-industrielle, la menace d'expulsion du chantier naval historique devient concrète.
Yves Estermann rentre à l'époque de voyages en haute mer, et d'une expérience de dix ans sur les constructions Alinghi, avec le projet de se fixer, en jeune père, dans le village de son enfance. Daniel Voruz est proche de la retraite. «On a vite parlé de reprise, témoigne Yves Estermann. Mais l'option la plus raisonnable aurait été de rester ici le plus longtemps possible puis de fermer boutique ou de louer une halle vers Forel ou au-delà.»
L'ancien syndic de Bourg-en-Lavaux, Max Graf, se souvient que «l'idée de garder dans la commune un jeune artisan d'ici s'est vite imposée». Il étudie diverses variantes d'implantation de ce nouveau chantier privé, notamment dans les hauts de Grandvaux, mais «faire circuler des bateaux sur la route? Non, il fallait que ce soit au port.»
Vigne d'utilité publique…
Finalement, c'est sur une parcelle de 900 m2 plantée en vignes, appartenant à Henri Voruz, frère de Daniel, que le bâtiment est projeté derrière le port. Le vigneron vend son terrain à Yves Estermann «à un prix raisonnable, bien loin des 1000 fr. par m2 au plateau de la gare». Et la construction est mise à l'enquête de mars à avril 2014, soit en pleine campagne «Sauver Lavaux III» (votation en mai 2014). «Je suis allé trouver Suzanne Debluë, secrétaire de l'Association Sauver Lavaux, pour lui présenter le projet et éviter son opposition, explique Yves Estermann. Elle a reconnu la pertinence d'un chantier naval au bord de l'eau.»
Suzanne Debluë explique: «Sauver Lavaux fait la pesée des intérêts, on ne veut pas figer à tout jamais! Implanter une activité nautique au bord du Léman était logique, cela a toujours été le cas.» Le fait que la vigne des Voruz soit en zone d'utilité publique, comme tout le port, et non en zone viticole a aussi détendu les rapports. Elle n'a pas été étonnée de voir débarquer le jeune patron. «Depuis quarante-cinq ans que je suis secrétaire de l'association, ça a bien changé. Avant, nous étions dans le militantisme, aujourd'hui, les gens viennent nous voir pour négocier, ils nous impliquent…»
N'empêche, la période est tendue entre habitants, vignerons et politiques de Lavaux d'un côté et collaborateurs de Franz Weber de l'autre. Des voix s'élèvent dans la presse pour que l'économie de Lavaux ne soit pas plombée par la votation de mai 2014, citant l'exemple du chantier naval de Moratel, que la 3e initiative Weber aurait empêché, selon certains.
Des cabanes de pêcheurs
Aujourd'hui, le hangar du CNDM est bien là. Et ceux qui craignaient l'implantation de cette structure artisanale dans un lieu de détente au bord de l'eau sont sans doute rassurés. «Nous avons cherché une échelle appropriée pour ce gros volume en travaillant la découpe de la toiture, qui évoque des cabanes de pêcheurs accolées les unes aux autres», explique Manuel Bieler, associé chez Localarchitecture, bureau qu'Yves Estermann a sollicité après avoir vu leur projet à l'École Steiner du Bois-Genoud, à Crissier.
Le bois, prépondérant dans cette construction, s'est imposé naturellement: «Le chantier naval restaure des bateaux en bois, c'est le matériau des cabanes de pêcheurs et, de manière plus générale, c'est la seule ressource durable dans la construction», justifie l'architecte.
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