Ces dernières semaines ont été très riches en déceptions sur le thème de la mobilité. D’abord par l’annonce en mars dernier que le chantier de la gare de Lausanne n’aurait pas moins de douze ans de retard sur le planning initial, jetant aux oubliettes tout espoir à court terme d’un réseau vaudois de transports publics efficace.
Puis, quelques jours plus tard, le Conseil fédéral nous informait qu’il prenait des mesures «d’allégement budgétaire» impliquant une réduction annuelle de 150 millions de francs pour le Fonds d’investissement ferroviaire, pourtant essentiel à l’entretien et au développement de nos infrastructures ferroviaires. En suite logique de cette mesure, l’Alliance SwissPass nous communiquait en avril une augmentation du tarif des trains à hauteur de 4,3% en moyenne.
«Un non-sens en termes économiques, scientifiques, urbains, agricoles et réputationnels.»
Ceci avant, quelques semaines plus tard, le coup de massue sur la Suisse romande par l’annonce de l’horaire CFF 2025 impliquant des temps de trajet plus longs pour notre région et la perte d’un train direct sur deux reliant Genève à Zurich, au détriment de la ligne du pied du Jura. Enfin, continuant sa valse sans tête, le Conseil fédéral proposait en parallèle il y a quelques jours de donner suite à une motion demandant l’élargissement à six voies de l’autoroute A1.
Dans l’ensemble, ces décisions interpellent réellement quant aux compétences du Conseil fédéral dans le domaine de la mobilité: en effet, pénaliser le réseau ferroviaire pour des motifs budgétaire tout en prônant l’élargissement d’autoroutes est un non-sens en termes économiques, scientifiques, urbains, agricoles et réputationnels.
Économiques car les coûts induits par un tel élargissement sont incommensurables, alors que les économies faites en parallèle au détriment du réseau ferroviaire entraînent irrémédiablement une baisse de fréquentation et des pertes de rentrées financières. Scientifiques car l’on sait qu’augmenter la capacité autoroutière au détriment des transports publics mène tout simplement à plus de congestion, selon le paradoxe de Downs-Thomson.
Sans tête ni raison
Urbains car le surplus de voitures ainsi engendré ne pourra logiquement pas être assimilé par les centres urbains, qui seront tout simplement plus bouchonnés. Agricoles car l’élargissement des autoroutes implique de prendre des espaces sur les terres agricoles à un moment où nous en avons particulièrement besoin. Et réputationnels car l’image de la Suisse est intrinsèquement liée à son fabuleux réseau ferroviaire et à ses paysages idylliques – deux éléments directement menacés par ces mesures.
Sans parler encore des problèmes connus, reconnus et évidents de cohésion nationale et d’urgence climatique. Au final, le Conseil fédéral prend non seulement un contresens clair en matière de mobilité, mais donne surtout l’impression de conduire sa politique en la matière sans tête ni raison. Une situation que l’on doit urgemment corriger, y compris et notamment lors des élections fédérales d’octobre 2023.
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L’invité – Le contresens du Conseil fédéral en matière de mobilité
Plusieurs décisions récentes interpellent notre contributeur.