Que de discussions stériles de part et d’autre, sur cette fameuse neutralité suisse. Je suis tout en accord avec la vraie neutralité, que chaque Suisse devrait défendre, mais pas cette neutralité prostituée que nous subissons. Nous devons la respecter totalement, et arrêter de vouloir le beurre et l’argent du beurre.
Avoir une industrie d’armement pour produire ses propres armes destinées à sa défense est nécessaire et neutre. Ainsi, nous ne dépendons pas d’autres pays, et ne faisons pas prospérer leurs industries de mort. Par contre, cette industrie ne doit pas exporter, car nous y perdons la neutralité.
«Nous devons respecter notre neutralité et arrêter de vouloir le beurre et l’argent du beurre.»
La richesse de notre pays nous le permet, les exportations d’armement ne représentant que 1% (moins d’un milliard par an) des exportations totales. Nous vendons des armes à l’étranger, conscients que ces armes vont semer la mort. Ce ne sont pas des jouets neutres. Elles ne sont pas destinées à la paix, ni à se retrouver au pied d’un sapin de Noël! En réalité, ces ventes à l’étranger, même à des régimes autocrates pas toujours fréquentables, entraînent une neutralité de façade. Le but n’étant que les bénéfices, puis d’organiser des conférences pour la paix profitables.
Alors, pourquoi tergiverser ainsi, d’autant que l’Ukraine a été agressée et essaie de se défendre, comme l’aurait fait la Suisse à sa place? Ce pays n’a pas la chance d’avoir le bouclier de l’OTAN autour d’elle. Si nous étions à la frontière russe et agressés dans notre intégrité territoriale depuis neuf ans, les arguments ne seraient pas les mêmes. Pourquoi acheter des armes à la Suisse si on ne peut les utiliser! Soyons cohérents!
Les régimes changent
Ce commerce n’est pas anodin. Il s’agit d’armes de poing, de matériel militaire de pointe, des canons, chars et avions. Elles se retrouvent par divers cheminements dans de nombreux conflits dans le monde (Yémen, Afghanistan, etc.) et c’est totalement inacceptable. Les présidents ou les régimes changent, mais les armes restent et tombent entre diverses mains.
Avant 2014, la Suisse vendait jusqu’à 90 millions de francs par an de matériel militaire à la Russie. Celui-ci n’est pas en vitrine au Kremlin, mais utilisé par l’armée russe en Syrie et aujourd’hui en Ukraine. Ce sont en particulier des filets et tenues de camouflage high tech, invisibles aux capteurs infrarouges et aux radars.
Durcir ou ramollir la loi sur la vente d’armes au gré du vent n’est qu’un placébo sur une jambe de bois. «Faire du fric» sur le malheur des peuples est abject, et de se réfugier derrière une neutralité de pacotille comme une autruche, encore plus. Après avoir livré la Russie, nous ne sommes pas en position de donner des leçons. Alors, politiciens de tous bords et vendeurs d’armes, laissez faire les pays qui désirent en donner à l’Ukraine. Mais gardons-nous d’en exporter et contentons-nous d’équiper notre armée de façon optimale, pour être prêts en cas d’agression future. Qui aurait parié sur une guerre totale en Europe il y a deux ans?
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
L’invité – Le matériel de guerre n’est jamais neutre
Sur le dossier des ventes d’armes à l’étranger, la Suisse joue sur une neutralité à géométrie variable, estime Jean-Michel Judlin, qui appelle à cesser les exportations.