Sommets musicaux de GstaadLe violoncelle frémissant
Le festival de Renaud Capuçon met le violoncelle à l’honneur. Zoom sur Anastasia Kobekina, lauréate 2018 du Prix Thierry Scherz.

Chaque année entre la fin du mois de janvier et le début février, les Sommets musicaux de Gstaad invitent des jeunes instrumentistes pour une forme agréable de concours traduite en série de minirécitals quotidiens à la chapelle de Gstaad à 16 h. Le ou la récipiendaire du Prix Thierry Scherz se voit offrir la possibilité d’enregistrer un disque avec orchestre chez Claves.
En 2018, la violoncelliste Anastasia Kobekina avait séduit le jury et rebondi avec un magnifique album «Chostakovitch, Weinberg, Kobekin» l’année suivante. Doué d’une sonorité à la fois raffinée et impétueuse, le violoncelle d’Anastasia Kobekina est polyglotte comme elle, à l’aise dans toutes les langues et cultures. Son étonnant dernier disque, «Ellipses», le prouve à nouveau en sautant à pieds joints à travers toutes les époques et les pays, avec un constant bonheur d’expression.
Si la Russe de 30 ans, qui n’est pas rentrée dans son pays depuis le début de la guerre, a grandi dans l’Oural, étudié en Allemagne – où elle réside –, et en France, qui la chérit, la Suisse est aussi très chère à son cœur, depuis sa première invitation à Verbier en 2011 déjà. «C’était ma première visite en Suisse et je me rappelle que la nature, la couleur du lac Léman, des montagnes et du ciel, étaient si intenses que tout me semblait irréel. Quand nous avions découvert le programme, même impression. Nous étions vraiment dans l’Olympe musical!»
«J’ai adoré ce mélange de nature enneigée et de gens qui se réunissent à la nuit tombée dans l’église de Saanen.»
La voici réinvitée dans la station bernoise, non comme un espoir, mais désormais comme une valeur sûre du violoncelle classique, l’instrument qui est à nouveau à l’honneur du festival en 2023. «Je me souviens de cette première invitation à Gstaad, raconte la violoncelliste russe dans un excellent français. J’ai adoré ce mélange de nature enneigée et de gens qui se réunissent à la nuit tombée dans l’église de Saanen. J’avais aussi eu un beau moment de découverte avec le compositeur en résidence cette année-là, le français Benjamin Attahir.» Pour cette édition, Diana Syrse, une compositrice et chanteuse mexicaine, est en résidence. Les jeunes violoncellistes joueront tous son œuvre inédite, «Black Fire», commandée par le festival.
Une sonate orchestrale
Le 31 janvier, Anastasia Kobekina revient à l’église de Saanen accompagnée par les cordes de l’Academy Menuhin pour jouer une transcription de la «Sonate Arpeggione» de Franz Schubert. «À vrai dire, il s’agit d’une double transcription, précise la soliste, puisqu’il a destiné cette pièce à un instrument, l’arpeggione, qui n’existe plus. Et les cordes remplacent le piano. Mais la musique de Schubert, comme celle de Bach, garde tout son sens quelle que soit l’orchestration.» Anastasia Kobekina y trouve aussi des parallèles avec les lieder: «Cette sonate offre une telle palette d’émotions, comme des chansons sans paroles, avec toujours ce mélange de larmes et de sourires, de tristesse et d’espoir.» Après l’entracte, la violoncelliste espère pouvoir se glisser discrètement dans l’orchestre pour se jeter à corps perdu dans les «Souvenirs de Florence» de Tchaïkovski, écrit à l’origine pour sextuor à cordes.
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