Festival féministeLes Créatives, la fête des humaines
Musiciennes, conférencières ou catcheuses, toutes les femmes de tête ont rendez-vous pour la 17e édition du festival féministe, du 16 au 28 novembre, principalement à Genève, également à Lausanne et Bâle.

C’est une fête qui s’amène. Pour tous les sens. Toutes les âmes. Les Créatives, 17e édition, invitent une fois de plus le monde à célébrer ce qui, en musique, au théâtre, dans la danse, dans les livres, en émotions comme en idées, porte la création des femmes.
Le programme s’avère pléthorique, comme à chaque fois. À Genève principalement, également à Lausanne et à Bâle, une centaine de rendez-vous s’offrent à la foule du 16 au 28 novembre. Pour se divertir, pour réfléchir, pour s’engager aussi.
Féminisme et vision inclusive
Les Créatives sont contagieuses. Rescapée des vagues virales les plus désobligeantes, obligée à une gymnastique improbable pour passer au-delà d’une interminable année blanche, la manifestation pointe au sortir du tunnel cette «crise humaine enracinée dans les discriminations». Pas tous égaux devant le Covid. Pas toutes non plus. Encore moins. Mais «le monde change vite». Les Créatives en prennent acte, qui le clament haut et fort.
Le mouvement féministe est tel aujourd’hui dans le monde de la culture, qu’on peut se demander si un festival consacré exclusivement aux artistes femmes - sans oublier le nécessaire astérisque pour dire les minorités de genre - fait encore sens. Les grandes institutions culturelles, musées, théâtres, compagnies de danse (avec en vis-à-vis les harcèlements récemment dévoilés) revendiquent eux aussi une vision inclusive. Mais le sujet n’est pas épuisé pour autant, loin de là. Le credo des Créatives garde toute sa pertinence, sachant la part encore aujourd’hui très minoritaire des femmes sur les scènes musicales.
C’est une joie que de découvrir ce bouquet explosif d’artistes de tous bords.
Avec le sérieux, avec la gravité, qu’imposent les thèmes abordés par le festival - au premier rang desquels la violence domestique reste tristement actuelle - il n’est pas interdit cependant de festoyer, de s’enivrer. Déborder le cadre, s’éclater, voilà l’autre moteur des Créatives, qui ont mis cette année la joie en frontispice.
Le festival genevois reprend le chemin des salles après une édition intermédiaire sur internet. Et c’est une joie, en effet, que de découvrir ce bouquet explosif d’artistes de tous bords. Voyez l’image placardée dans les rues pour cette 17e édition: des fleurs en éruption émergeant de la fenêtre d’une voiture, côté conductrice, absolument.

Pétales, pistil, étamine - deux organes reproducteurs pour un seul et même individu, vive les plantes! Accompagnées d’un bras levé, un bras de couleur, absolument, pointant vers l’avant des ongles d’une longueur ahurissante. Comme pour caresser le vent, le saisir peut-être, en faire son allié. Et foncer… Affiche réalisée par les graphistes genevoises Sonia Gonzalez et Mélanie Herrmann, alias les Studios BAD, c’est peu de donner leurs noms.
Lancées à pleine vitesse, Les Créatives marquent l’agenda d’un rythme tendu, intense, trépidant. Entre autres couleurs réunies sur la bannière du festival, on retient d’entrée Yseult, la sculpturale chanteuse franco-africaine. Sa voix s’ancre profondément dans le répertoire à texte, voguant à l’allure ultrarapide du rap contemporain. Yseult qui se produira sur scène en ouverture, le 16 novembre à l’Alhambra.
D’Arlo Parks à Camélia Jordana
Hors des prises de becs médiatiques et des polémiques d’attitudes, à propos d’un caractère qu’elle a bien trempé dit-on, voyons plutôt le contenu artistique. Yseult comme symbole des Créatives engagées, ça le fait très bien.
Et le bouquet, disions-nous? Particulièrement varié, cette année encore. Ainsi Camélia Jordana et Arlo Parks, ainsi Bonnie Banane - parmi nos coups de cœur. Comme Erika Stucky, la Californienne du Haut-Valais en création avec l’Ensemble Contrechamps, spécialiste du répertoire contemporain. Le spectacle s’intitule «ICE», la glace en français, qui, des Alpes, évoque les mythes, les fantômes, l’enfance également. Deuxième coup de cœur. Mais on est loin d’avoir fini la liste.
On réclame les catcheuses, deux femmes, les seules à pratiquer en Suisse une discipline qu’on dit masculine jusqu’au bout du slip.
Les Créatives font le buzz avec leur volet musical. Pour rameuter le public, c’est ce que le showbiz nomme traditionnellement «locomotives». Dans ce cas, cette édition est un événement. Et pour le théâtre, les performances, la danse aussi! Voir «Doreen» au Forum Meyrin, «Go Go Othello» à Saint-Gervais, «La peau de l’espace» par Yasmine Hugonnet à Vidy. Noter, également, les forums, les tables rondes, depuis toujours organisées par la manifestation.
Pour qui cherche des voix fortes, des modèles à suivre, Les Créatives, c’est leur identité, restent ouvertes à toutes les inspirations. On écoutera ORLAN, l’artiste plasticienne française qui a fait de son corps son chef-d’œuvre, invitée pour une discussion sur les «boulets de canons». Sous-titre: «Beauté, normes, rapports de pouvoir et dominations». Incontournable. On réclame les catcheuses, deux femmes, les seules à pratiquer en Suisse une discipline qu’on dit masculine jusqu’au bout du slip. À suivre dans la salle des armures du Musée d’art et d’histoire de Genève. Laissez passer les batailleuses!
Festival Les Créatives, 17e édition, du 16 au 28 novembre, divers lieux à Genève, Lausanne et Bâle.
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