À un moment où le pouvoir d’achat dégringole, les politiques débattent des allégements fiscaux et de la baisse d’imposition des personnes physiques. Le discours a été couronné de succès dans le canton de Vaud.
D’utiles enseignements peuvent être tirés de l’histoire*. Ainsi, l’endettement critique provoqué par la guerre de Sept Ans (1756-1763), qualifiée de première guerre mondiale, modifia les équilibres des forces sur le Vieux-Continent. La France en fut la principale victime.
«Des parentés: conflit armé sur le sol européen, finances vacillantes, population appauvrie et implication de la Suisse dans les jeux d’alliances.»
260 ans plus tard, on retrouve des parentés: conflit armé sur le sol européen, finances vacillantes, population appauvrie et implication de la Suisse dans les jeux d’alliances. Pour renflouer la trésorerie, Louis XV engagea une double enquête sur la levée des impôts dans son pays et les modes d’imposition en Europe.
En 1765, le représentant français, à Soleure, remit, comme trente de ses collègues diplomates auprès des cours européennes, son mémoire sur les natures d’impôts dans la Confédération des XIII cantons. Il y souligne le génie de chaque canton à assumer ses obligations, principalement par des mesures transitoires, à recourir à des impôts indirects sur les produits et les péages, dans le cas de caisses publiques vides. La taxation se veut proportionnée et ne frappe pas indistinctement tout le monde. La dîme est l’impôt de référence.
L’image de la Suisse est flatteuse: «C’est tout à la fois le modèle de gouvernement aristocratique en Europe représenté par le canton de Berne, et le pays de la démocratie, de la liberté personnelle et politique, de la conduite paisible du pouvoir, de la possibilité d’élaborer des consensus et des structures de gestion du pouvoir relativement rudimentaires, la modération, voire l’absence de toute imposition directe sur le rendement agricole.» C’est «un peuple avant tout de paysans, chanceux, épris de liberté, non corrompus, soumis à une fiscalité modeste, harmonieuse et bien acceptée, vivant à l’intérieur de ses montagnes en toute sécurité et, si ses ressources sont modestes en raison d’un sol souvent ingrat, elles suffisent à le nourrir.»
Un vocabulaire idéalisant
On prête à la Suisse des valeurs fortes et authentiques, fondées sur le droit naturel. L’expression fait partie du vocabulaire idéalisant et sublimant les Alpes au XVIIIe siècle, lieux privilégiés, intacts dont les visiteurs peuvent et doivent s’imprégner. Par effet miroir, les habitants de la Suisse sont porteurs de cette pureté originelle. «Se rendre dans les Alpes, c’était valoriser un modèle politique et social qui les consacrait en qualité de berceau des valeurs universelles, qu’elles fussent culturelles, esthétiques, médicales, physiques ou scientifiques». Son nouvel atout reconnu alors: la fiscalité.
* Pour le détail, voir notre article en ligne dans la «Revue suisse d’histoire», 70/2, 2021.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
L’invité – L’histoire propose également un éclairage sur la fiscalité
Gilbert Coutaz fait le lien entre la situation actuelle et celle du XVIIIe siècle en Suisse et en Europe.