L'immobilier suisse réduit ses coûts avec des locations de très courte durée
Les utilisations intermédiaires de surfaces vides sont en plein boom outre-Sarine. Le phénomène perce en Suisse romande.

Appartement à louer, avec vue imprenable sur le lac, dans un ancien quatre-étoiles, pour un loyer… abordable. Les Zurichois se sont frottés les yeux en découvrant l'annonce. Ils ne rêvaient pas: 100 logements, bureaux et ateliers ont bien été mis en location, à prix cassé, dans le Dolder Waldhaus, annexe du luxueux hôtel Dolder Grand.
Le loyer pour un 50 mètres carrés: 800 francs par mois. Ce qui est largement en dessous du prix du marché zurichois. Plus de 2000 dossiers ont été déposés! Cette affaire en or n'est pas une réponse miraculeuse à la crise du logement, mais le reflet d'une tendance croissante dans le secteur immobilier.
Visibles notamment au travers de la multiplication des pop-up, ces magasins ou restaurants à durée de vie limitée, les «utilisations intermédiaires» gagnent en popularité et en crédibilité. Les propriétaires sont de plus en plus nombreux à vouloir faire vivre un immeuble, une aire industrielle ou même une villa vides en voie d'être détruits, rénovés ou qui n'ont pas encore trouvé de locataire.
Le coût du vide
Des mois, parfois des années peuvent s'écouler jusqu'à ce que la perle rare soit trouvée ou le premier coup de pelleteuse donné. Le cas du Dolder Waldhaus est représentatif. La bâtisse vieillissante doit être remplacée par un hôtel moderne. Mais un voisin ne l'entend pas de cette oreille: un recours retarde les travaux, qui auraient dû débuter l'an dernier. Misant sur la fin du litige pour la fin de l'année 2019, le propriétaire a décidé de louer les chambres jusqu'au mois de décembre de cette année-là. «C'était la solution idéale. Un bâtiment vide, ça coûte de l'argent en frais de gardiennage et d'entretien», relève Thomas Schmid, responsable du projet.
Longtemps associé aux squats, l'éphémère a réussi à se faire une nouvelle image. Même l'Association suisse des propriétaires encourage désormais ses membres à emprunter cette voie. une solution qui permet de couvrir les coûts d'entretien, voire de réaliser un bénéfice en cas de signature d'un bail à loyer et non pas d'un contrat de prêt à usage, selon lequel l'emprunteur ne paie que les frais annexes. Pour le propriétaire, c'est aussi le moyen de prévenir une occupation illégale. Le locataire, lui, bénéficie souvent d'un loyer réduit en raison de la durée limitée du contrat et de l'état des locaux ou de leur aménagement «brut».
Exemples genevois
Dans une étude parue au printemps, le cabinet de conseil immobilier Wüest Partner a répertorié plus de 1000 surfaces commerciales mises temporairement à disposition ces deux dernières années! Les objets se trouvent principalement dans les grandes villes alémaniques – et toujours plus au centre –, Zurich étant largement en tête. Mais la tendance a aussi gagné la Suisse romande.
A Lausanne, il y a des exemples dans le quartier du Flon. A Genève, on relève le cas du Village du soir, boîte de nuit qui a pris ses quartiers au milieu d'entrepôts industriels voués à la destruction en 2022. «Outre-Sarine, ce marché est beaucoup plus institutionnalisé. Des entreprises se sont spécialisées dans le domaine», explique Hervé Froidevaux, de Wüest Partner.
Projekt Interim a été parmi les premiers à miser sur le vide. Fondée en 2013, la société zurichoise joue les intermédiaires entre utilisateurs temporaires et propriétaires ou régies. Elle compte parmi ses clients le groupe immobilier Swiss Prime Site ou l'assureur Generali. Depuis ses débuts, elle a permis de combler provisoirement 80 espaces, pour près de 1500 usagers. C'est à cette entreprise qu'a fait confiance le Dolder. A Genève, c'est elle qui est aussi à l'origine de la transformation – provisoire – d'un ancien site de production pharmaceutique en atelier d'artistes et bureaux, à Vernier.
Projekt Interim ne donne pas d'indication sur la commission touchée ni sur le chiffre d'affaires. «La demande est relativement élevée. Elle augmente chaque année», se contente d'informer Lukas Amacher, responsable de la communication.
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UBS tente aussi sa chance
La toute jeune société zurichoise Novac-Solutions lui fait concurrence à Projekt Interim depuis décembre. Agés de 24 ans, les fondateurs, Jerome Jaggi et Alexandros Tyropolis, sont convaincus du potentiel. «Il y a tellement de bâtiments vides!» dit le premier. A Zurich et dans les autres grandes villes du pays, le taux de vacance des surfaces de bureaux atteint des records. «L'un de nos objectifs est d'insuffler de la vie dans un lieu désaffecté et dans ses alentours. C'est important pour l'image du propriétaire et du quartier.» La jeune pousse a déjà décroché deux gros clients. Swiss Re vient de lui confier un immeuble en phase de transformation. Tout comme UBS, pour des bureaux situés à Zurich et détenus par un de ses fonds immobiliers. C'est la première fois que la première banque helvétique tente l'expérience.
«Cela nous permet de couvrir les frais d'entretien et nous avons même généré un petit rendement pour nos investisseurs», rapporte Corinne Manco, porte-parole d'UBS.
Novac-Solutions a réussi à y attirer plusieurs start-up. Celles-ci devront quitter les lieux en septembre. Les jeunes entreprises apprécient la flexibilité du modèle et les loyers bas. La firme a aussi installé elle-même un espace de coworking sur tout un étage. «L'idée est de le déplacer de bâtiment en bâtiment», explique Jerome Jaggi.
Le jeune entrepreneur espère que sa société sera bénéficiaire d'ici à la fin de l'année. A ses yeux, le marché de l'éphémère est là pour durer. G.S.
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