InformatiqueL’industrie de la confiance avance dans la vallée de la cybersécurité
La seconde volée de start-up dédiées à la sécurité numérique achève son passage à l’accélérateur de la Trust Valley.

La sécurité numérique est au cœur de l’actualité. La semaine dernière, la 3e édition des Swiss Cyber Security Days réunissait, en ligne, plus de 1800 spécialistes et conférenciers. Des hautes écoles aux entreprises, en passant par Interpol et l’armée suisse, la question devient de plus en plus présente alors que la numérisation de la société s’est vue accélérée par la pandémie de coronavirus. À la fin du mois se clôturera la deuxième saison de l’accélérateur Tech4Trust, destiné à soutenir les jeunes entreprises qui se lancent dans ce domaine.
La démarche est menée sous l’égide de la Trust Valley, cette initiative lémanique associant les Cantons de Vaud et de Genève, universités et entreprises. L’objectif est de créer des synergies entre tous ces acteurs dans la cybersécurité, plaçant l’arc lémanique sur la carte des régions qui comptent en la matière. L’an dernier, le géant Microsoft faisait partie des partenaires présentés dans la mise en place de cette «vallée de la confiance». Un géant qui vient justement de subir une vaste attaque sur ses serveurs Exchange. Et les Suisses ont montré dans les urnes leur méfiance face à la création d’une identité numérique.
Un tournant pour le numérique
«Dans le monde virtuel, la confiance n’est pas facile à gagner. Cela fait trente ans qu’internet se développe de façon anarchique et on se trouve aujourd’hui à un tournant où la sécurité doit se développer. Ce qu’on demande aujourd’hui aux entreprises qui démarrent, c’est de faire les choses parfaitement dès le départ.» À la tête de la Trust Valley, Lennig Pedron compte bien faire de ce réseau une place centrale pour que se développe la confiance dans l’industrie numérique.
Et on part de loin, estime-t-elle: «Même les particuliers ne sont pas encore assez conscients des problèmes de sécurité. Pourtant, dans la vraie vie, ils ne se promènent pas dans la rue avec une liasse de billets à la main. Cela doit être pareil en ligne.» Pour cette spécialiste, la menace actuelle est de voir que l’intelligence artificielle se développe chez les pirates informatiques également. L’image du hacker artisanal semble bien avoir franchi le cap de l’échelon industriel.
Alors que faire pour les start-up en plein développement? «Les 27 start-up sélectionnées ont pu bénéficier d’ateliers sur différents thèmes comme le marketing, la négociation ou encore la levée de fonds, indique Lennig Pedron. Mais elles ont surtout bénéficié d’échanges directs entre ses membres, des mentors et des coaches. Ces échanges de connaissances permettent de gagner du temps et, quelques mois de gagnés, c’est essentiel à la conquête d’un marché.» Un classement sera établi, avec un prix récompensant le podium. Mais pour la directrice de Tech4Trust, l’essentiel est d’avoir pu bénéficier de ce programme d’accélération de cinq mois et du réseau qui l’accompagne.
Yverdonnois à la conquête du monde
À Yverdon-les-Bains, le parc scientifique et technologique fait partie des lieux que regroupe la Trust Valley. C’est dans l’incubateur d’Y-Parc qu’est née la société Sysmosoft. Cet éditeur de logiciel est spécialisé dans la signature électronique. Elle est un exemple de ce que peut apporter ce type de structure, où elle commence à se sentir à l’étroit. C’est que l’année écoulée a vu bondir la marche de ses affaires. «La Trust Valley, cela donne une visibilité, un réseau que l’on n’avait pas à l’époque, témoignent les deux fondateurs, Frédéric Mauger et Mark Vincent. Mais ce n’est pas parce qu’une start-up rejoint l’accélérateur Tech4Trust qu’elle va automatiquement réussir.»
Presque quarantenaires, les deux ingénieurs font partie des anciens en regard des jeunes pousses du jour. Leur entreprise, fondée en 2009, atteint aujourd’hui un stade qui pourrait bien la voir s’envoler. Ils ont développé, au cours de leurs études à Yverdon, un système de sécurisation des communications entre médecins et patients. Le projet a séduit une banque privée, qui en voulait pour les échanges entre les gestionnaires de fortunes et leurs clients. «À l’époque, c’était novateur, dit Mark Vincent. Imaginez que WhatsApp a introduit le cryptage des conversations il y a trois ans seulement.»
«Ce que l’on développe en Europe va servir de modèle et s’exporter dans le monde, et pour nous, le futur est à l’échelle internationale.»
Une première levée de fonds avait réuni 3 millions de francs en 2013 pour le développement de Sysmosoft. Mais son modèle actuel s’est profilé en 2016, lorsque l’Europe puis la Suisse ont introduit leur réglementation sur la signature électronique, qui est désormais aussi légale qu’une signature manuscrite au bas d’un document. Les affaires semblaient florissantes pour l’entreprise, déjà rentable en 2018. Et la crise du Covid a encore accéléré les choses. Les clients affluent du monde entier. «Ces réglementations sont innovantes, dit Frédéric Mauger. On est en train de construire, ici, des compétences uniques au monde.» Il cite en exemple un client potentiel en Tunisie, pays dépourvu de loi dédiée aux signatures électroniques. «Ce que l’on développe en Europe va servir de modèle et s’exporter dans le monde, et pour nous, le futur est à l’échelle internationale.»
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