L'Ouest bute sur l'épineux chantier de la culture
Après le rejet du Musée Bolo à Bussigny, Renens se bat pour la Ferme des Tilleuls. Le district a-t-il droit à de vraies ambitions?

Comment se mesurent les ambitions culturelles d'une ville? Dans le cas de Renens, on pourrait avancer les chiffres suivants: 26 tonnes, 13 mètres de haut, 14 mètres de large et 20 mètres de long. Ce sont les mensurations du «Colossal d'art brut», œuvre géante que la Commune souhaite ériger dans la cour de la Ferme de Tilleuls d'ici à 2020.
S'il se concrétise, ce projet aurait tout d'un joli coup. En 2015, la Ville avait reçu cette installation hors norme de l'artiste française Danielle Jacqui, figure de l'art dit singulier. Cadeau. Aujourd'hui, l'objectif est clair: faire rayonner le nouveau lieu culturel de Renens, la Ferme des Tilleuls, grâce à une pièce maîtresse qui se verra de loin. Mais, plus que jamais, la partie est serrée. En effet, à l'heure où l'Ouest lausannois se dote de sérieuses ambitions culturelles, les résistances se font jour.
Moment critique
En décembre dernier, le Conseil communal de Renens avait sur la table une demande de crédit de 200'000 francs. De quoi apporter un premier financement pour la construction du «Colossal d'art brut», devisée à 2,4 millions de francs. Une campagne de levée de fonds devait démarrer dans la foulée. Elle devra attendre. Les débats au plénum ont été si vifs que la Municipalité a retiré provisoirement le préavis pour le repenser.
Les griefs des élus sont venus de tous bords. Ni indispensable ni urgent, le projet s'annoncerait comme un gouffre financier. Il ne trouverait pas d'écho dans la population et son effet stimulant sur l'économie locale serait incertain. À vrai dire, le timing de ce préavis était pour le moins délicat, car la Ferme des Tilleuls elle-même n'est pas en position de force.
La Ville a déjà beaucoup investi dans ce lieu d'exposition gratuit, qui depuis presque deux ans se forge une identité hors des sentiers battus. Au risque de mettre du temps à trouver son public. Au printemps, la fréquentation, entre autres questions, avait agité la commission de gestion du Conseil communal. Depuis l'automne dernier, le poste de directeur administratif de l'institution est à repourvoir. Enfin, l'association I lake Lausanne, qui tient la buvette, a décidé de se retirer fin mars, faute de clientèle.
Besoin de beau
Dans l'Ouest, la Ferme des Tilleuls n'est pas le seul projet culturel à susciter des crispations. En septembre dernier, la création d'un nouvel écrin, à Bussigny, pour accueillir le Musée Bolo avait été rejetée par référendum populaire. Quelques mois plus tôt, les élus communaux s'étaient déjà déchirés sur le besoin d'investir dans un tel projet. La question est encore plus sensible à Renens, où les finances sont moins solides et les dépenses importantes. «Il ne faut pas opposer les besoins sociaux et la culture, comme j'ai pu l'entendre, défend Marianne Huguenin, qui préside aujourd'hui la Fondation de la Ferme des Tilleuls. Dans une situation difficile, il y a d'autant plus besoin de beau.»
L'ex-syndique popiste a elle-même beaucoup œuvré pour créer un lieu culturel et d'exposition dans un district qui en manque cruellement. «L'Ouest lausannois est plus grand que Vevey, Morges ou Nyon, mais nous n'avions pas du tout la même offre ni la même tradition de culture.» Une partie de l'explication réside dans l'urbanisation récente de la région. Mais ce n'est pas tout. «Il existe une énorme offre culturelle autour du district. Ce n'est pas comme si la population n'avait rien à se mettre sous la dent», analyse Claudine Wyssa, syndique de Bussigny, qui avait défendu sans succès le projet de Musée Bolo.
Solidarité de district?
«En culture comme en politique, nous rêvons tous d'obtenir l'adhésion de la population pour un projet. On se rend compte que ce n'est pas si facile. Il faut se faire militant», pose Marianne Huguenin. Les idées ne manquent pas pour cela, notamment celle de lancer une campagne de crowdfunding pour «Le Colossal d'Art Brut», en proposant aux particuliers d'acheter symboliquement l'une des 4000 pièces de céramique qui le composent.
Les villes de l'Ouest sont-elles condamnées à livrer seules leur bataille pour la culture? Pour le projet de Musée Bolo, Bussigny avait annoncé que plusieurs municipalités étaient ouvertes à apporter une participation financière. Aujourd'hui, Claudine Wyssa est moins optimiste. «Cela viendra un jour, mais il n'y a pas encore de vraie volonté de travailler ensemble pour la culture.» De fait, en 2017 il avait fallu de longues discussions pour que les huit communes du district participent davantage au financement du Théâtre Kléber-Méleau, largement porté par Lausanne. La Ferme des Tilleuls devra faire son chemin, et ses preuves, avant que son tour ne vienne.
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