Ainsi une bonne partie des Britanniques auraient suivi d’un œil ému les funérailles de leur reine Elizabeth II, versé une larme en défilant devant le cercueil de leur Très Gracieuse Majesté ou au passage de son cortège funéraire.
Dix jours plus tard, l’émotion retombée, j’ose poser la question: no, but seriously, les gars, vous y croyez? Vous croyez à cette histoire de royauté, qui voudrait que le ciel ait désigné une famille comme étant, de manière héréditaire, capable de prendre en charge la conduite d’un peuple?
«Il y aurait pas mal de nostalgie d’un temps jadis idéalisé dans les larmes des Britanniques.»
Je lis dans Wikipédia que la royauté serait «une institution sacrée», que le souverain serait élevé «au-dessus du statut purement humain». Sérieux? Moi qui ai grandi dans la très démocratique Confédération suisse, où les aristocrates se font discrets, qui n’ai pas été touché par la grâce de la foi, j’ai bien du mal avec cette fable.
Bon, la mort d’Elizabeth – qui pourrait coûter de 1,2 à 6,3 milliards de francs à l’économie britannique entre jours fériés, funérailles et changements entraînés par sa disparition – et les cérémonies ont été «l’occasion d’exprimer notre fierté d’être Anglais», déclarait une femme à mon collègue Tristan de Bourbon, correspondant à Londres de ce journal. Je veux bien le croire. À propos d’Elizabeth II, ce même confrère, qui s’y connaît (c’est un descendant de Louis XIV), écrivait: «Sa longévité a aussi influencé l’inconscient des Britanniques. En particulier leur attachement à l’époque impériale, leur inclinaison pour la bienséance et le maintien de l’ordre social, la préservation d’une société très hiérarchisée où le système de classe persiste – presque – au grand jour. »
Nous y voilà. Dans les larmes des Britanniques, il y aurait pas mal de nostalgie d’un temps jadis idéalisé. Car si j’en crois un autre correspondant à Londres, celui du quotidien français «Le Monde», «Au Royaume-Uni, plus rien ne marche» (article paru le 27 septembre). Le plus massif mouvement de grève depuis trente ans (trains, postiers, éboueurs, avocats ou dockers, même combat), une économie en récession, un nombre record de patients en attente de traitement, une inflation à 10%: le pays s’enfonce dans la cachexie.
Recours aux superpouvoirs?
Ne serait-ce pas le moment de faire appel aux superpouvoirs du nouveau monarque? Qui, lors de son couronnement (on se réjouit déjà) pourra faire appel au Seigneur: «Que Dieu m’aide pour cela», avait déclaré sa mère dans l’abbaye de Westminster, au moment de faire le serment de protéger son royaume (et l’Église d’Angleterre). Ah, vous n’y croyez pas? Certains «sujets» de Charles III non plus. Ainsi, l’historien Symon Hill estime que le roi n’a accédé au trône que «par un accident de naissance et parce que ses ancêtres ont pris le pouvoir par la force». Il me semblait bien. Des affichettes «Down with the monarchy» sont également apparues dans certaines rues du royaume.
Ça me rassure. Face aux images des funérailles, je me sentais un peu comme un enfant condamné à la solitude parce qu’il ne croirait pas au Père Noël ou à Blanche-Neige.
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La rédaction – Mais qui diable t’a fait roi, Charles III?
Le nouveau monarque se retrouve à la tête d’un royaume bien mal en point.