Carnet noirMort du sulfureux Kenneth Anger
Figure culte d’un cinéma underground, gay et camp, le réalisateur est décédé à l’âge de 96 ans.

Né artistiquement dans les marges, Kenneth Anger y est demeuré toute sa vie, même s’il est devenu au fil des ans une figure vénérée par tous les amateurs d’une culture alternative et souterraine. Ce cinéaste culte, désormais décédé à l’âge de 96 ans le 11 mai dernier, s’est imposé dans des cercles restreints par une œuvre fantasmatique, symboliste, marquée par ses obsessions homosexuelles et occultistes.
Très précoce – il réalise son premier court métrage à 10 ans –, il se fait remarquer en 1947 avec «Fireworks», film aux accents sadomasochistes: un scandale et un procès dans des États-Unis qui criminalisent encore l’homosexualité. Ce métrage lui vaudra l’amitié de Jean Cocteau, l’un de ses modèles avec Méliès, qui le visionne au festival de Biarritz. Mais il intéressera aussi le sexologue Alfred Kinsey.
«Ses films deviennent des parangons d’une exploration extravagante des soubassements de la psyché et de ses déviances, sans aucun égard pour les codes moraux de son époque.»
Le cinéaste ne déviera pas de sa ligne trouble et sulfureuse, encore redoublée par ses intérêts pour l’occulte, en adepte de la doctrine ésotérique de Thelema, fondée par Aleister Crowley. Plusieurs de ses films deviennent des parangons d’une exploration extravagante des soubassements de la psyché et de ses déviances, sans aucun égard pour les codes moraux de son époque.
Fâcher les néonazis
En 1963, «Scorpio Rising» et son mélange d’images de motards, de culture gay, de christianisme et de nazisme, parvient à fâcher à peu près tout le monde, parti néonazi y compris… Mais Kenneth Anger parviendra à échapper à son soupirail de hors-la-loi avec ses livres, notamment son «Hollywood Babylone» – d’abord paru en français chez Pauvert en 1959 – qui recense la supposée vie secrète et scandaleuse de plusieurs personnalités du cinéma américain, de Charles Chaplin à Marilyn Monroe, en passant par Rudolph Valentino, Errol Flynn, Lana Turner ou Judy Garland.
Un ouvrage qui contribuera largement à étendre sa notoriété subversive. Encore actif il y a une quinzaine d’années, Kenneth Anger n’a pas manqué d’influencer de nombreux artistes et cinéastes au cours de sa longue mais tortueuse carrière: Andy Warhol, David Lynch et bien entendu John Waters.
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