Déjà prorogé trois fois depuis son adoption en 2005, le moratoire sur l’utilisation des OGM (organismes génétiquement modifiés) dans l’agriculture est à nouveau sur la table du parlement, qui doit décider en cette session de printemps d’une nouvelle prolongation de quatre ans. Une question importante devra cependant être tranchée. Faut-il ou non ouvrir une brèche dans cette interdiction, comme le demande le Conseil des États par une décision prise grâce à la voix prépondérante de son président? Au tour du Conseil national de trancher…
Il est dans l’intérêt non seulement de l’agriculture, mais aussi de la société dans son ensemble de pouvoir disposer de plantes cultivables mieux aptes à résister d’une part à des agents pathogènes qui se renouvellent constamment, d’autre part aux effets du réchauffement d’un climat par ailleurs toujours plus volatil. Certes, les innovations dans les techniques culturales, liées notamment au développement de la robotique, sont prometteuses; mais elles ne permettront certainement pas de relever l’ensemble des défis auxquels l’agriculture doit faire face. Et, surtout, la sélection végétale traditionnelle nécessite beaucoup de temps pour produire des résultats tangibles et ne peut donc apporter les solutions urgentes que l’on attend.
«Il est temps de quitter le terrain dogmatique dans lequel le débat sur les OGM est enlisé.»
Forts de ces constats, nous pensons qu’il est temps de quitter le terrain dogmatique dans lequel le débat sur les OGM est enlisé pour tenter d’identifier ce que les nouvelles technologies de sélection végétale non transgénique peuvent amener comme progrès. Ces NTS, comme on les appelle, regroupent une palette de modes de sélection aptes à répondre aux défis agronomiques actuels; leur principale caractéristique est de pouvoir modifier le patrimoine génétique d’une plante sans introduire de gènes qui lui soient étrangers.
En d’autres termes, elles permettent d’aboutir plus sûrement et de façon rapide à un résultat similaire à celui pouvant être obtenu par la sélection classique après de longues années de recherche. Leur effet sur le génome est analogue à ceux de la mutagenèse (production de mutation biologique), à la différence près que les modifications n’interviennent pas de façon aléatoire mais de manière ciblée, en fonction des caractéristiques que l’on souhaite conférer au végétal concerné.
Une nécessaire différentiation
Toutefois, l’ouverture à l’usage de ces méthodes requiert que leur mise en œuvre procure une plus-value avérée pour l’agriculture, les consommateurs et l’environnement. Mais également, et c’est une condition indispensable, que le produit de leur utilisation ne soit pas assimilé aux OGM.
Dans le cas contraire, l’agriculture aurait plus à perdre qu’à gagner vu l’aversion persistante des consommateurs à l’égard de ces organismes et les multiples inconvénients qu’impliquerait la cohabitation de filières avec et sans OGM. C’est donc bien d’une législation spécifique pour encadrer les NTS, en dehors de la loi qui régit les OGM, dont l’agriculture a besoin aujourd’hui.
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L’invité – OGM et agriculture, comment sortir de l’impasse?
Luc Thomas souhaite une législation spécifique pour encadrer les nouvelles technologies de sélection végétale.