Manifestant pro climat face aux jugesPeine minimale pour l’auteur de mains rouges sur Credit Suisse
Le jeune militant de Breakfree écope d’une amende de 100 francs et devra payer les frais de nettoyage. «On a fait tout ce qu’on a pu», dit son avocate.

Cent francs d’amende. Et quatre cents francs pour le nettoyage des murs. La peine est inversement proportionnelle au bruit qu’a fait l’affaire. Jeudi, les juges de la Chambre pénale d’appel et de révision ont condamné le jeune militant de Breakfree pour dommages à la propriété, coupable d’avoir peint des mains rouges sur la façade de Credit Suisse à la rue de la Monnaie.
Verdict scellé
Quatre ans plus tard, ce jugement pourrait bien être le dénouement d’une affaire qui a traîné en longueur. Pourquoi tant de temps? Parce que le dossier est revenu devant les juges d’appel, lesquels avaient innocenté le jeune militant. Pour cela, ils avaient convoqué l’état de nécessité, ce principe selon lequel un acte illicite est toléré s’il empêche la réalisation d’un dommage plus grave.
Mais le Tribunal fédéral allait faire une autre lecture du dossier en rejetant l’argumentation des juges genevois pour finalement exiger une condamnation. La Chambre d’appel allait donc devoir reprendre les audiences et punir l’auteur du dommage.
«Notre constat est un constat d’échec. Le temps n’a rien changé.»
Le verdict ne faisait donc aucun mystère. Et c’est à contrecœur, contrainte par le Tribunal fédéral, que la présidente Gaëlle Van Hove a lu le verdict de culpabilité au jeune militant âgé de 26 ans. Disposant tout de même d’une certaine marge d’appréciation, elle a insisté sur le «faible dommage causé» à la banque» (les 2250 francs réclamés au prévenu ont été nettement revus à la baisse) et reconnu le mobile honorable ainsi que le désarroi de ce jeune profondément angoissé par le dérèglement climatique.
Puis, la juge a eu ces mots qui disent le paradoxe de la condamnation: «Notre constat est un constat d’échec. Le temps n’a rien changé.»
«Génération oubliée»
Formellement, le dossier peut encore être contesté. Du côté de la défense, en tout cas, Me Laïla Batou se félicite que les juges aient reconnu «le mobile honorable» et n’ira pas au Tribunal fédéral. «On a fait tout ce qu’on pouvait», dit-elle sur les marches du Palais de justice.
Avec détermination et combativité, l’avocate avait fait de ce procès un symbole, celui d’une génération oubliée par les institutions et d’une justice qui refuse de voir la réalité du réchauffement climatique en face.
Au final, le verdict se sera limité à une affaire de peinture à la craie et au remboursement des quelques heures de nettoyage de la façade.
Luca Di Stefano est journaliste à la rubrique genevoise depuis 2013. Diplômé de l'Académie du journalisme et des médias (AJM), il couvre en particulier l'actualité judiciaire.
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