Quand certaines Communes riches refusent la solidarité
Pierre Dessemontet regrette que les autorités de villes et villages parmi les plus aisés du canton revendiquent l'inégalité.
Ce jeudi 23 janvier, les Municipalités de Rolle et de Crans-près-Céligny ont invité les représentants des communes vaudoises à des «assises sur la facture sociale», lors desquelles il sera exigé une reprise complète de la facture sociale par le Canton, sans autre forme de procès – une proposition choc qui mérite qu'on s'y arrête un peu.
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Selon le décompte final de la facture sociale incombant aux communes pour 2018, cette dernière représente un total de 790 millions de francs. Une reprise complète de cette somme alourdirait le budget cantonal d'autant, faisant passer le Canton d'une situation de bénéfice structurel de l'ordre de 300 millions de francs à une situation de déficit structurel d'environ un demi-milliard de francs par an – une situation qui provoquerait soit une hausse des impôts cantonaux qu'on peut évaluer à 15 points, soit une baisse correspondante des prestations de l'État.
De leur côté, les communes vaudoises prises dans leur globalité se verraient dotées de 790 millions de francs supplémentaires, passant d'une situation de quasi-équilibre – en 2018, elles accusaient un déficit cumulé d'environ 21 millions de francs – à une situation immensément bénéficiaire. En bref, on passerait d'une situation de déséquilibre à une autre, infiniment plus marquée.
Mais il y a encore pire: ce retour aux communes se ferait de manière extrêmement inégalitaire. En effet, la facture sociale telle qu'actuellement perçue comporte un fort effet péréquatif: la majorité de la facture sociale est calculée en points d'impôts – plus la capacité fiscale d'une commune est forte, plus elle paie, selon le principe de la flat tax; en outre, une part subsidiaire de la facture est issue de l'écrêtage, un mécanisme progressif qui fait porter une part supplémentaire de la facture aux communes les mieux dotées fiscalement.
«Supprimer ce système, ce serait rendre l'argent de la facture sociale de manière disproportionnée aux communes les plus aisées du canton»
Supprimer sans autre forme de procès ce système, ce serait donc rendre l'argent de la facture sociale de manière disproportionnée aux communes les plus aisées du canton, celles qui en ont le moins besoin, dont les taux d'impôt sont déjà parmi les plus bas, et qui n'auront pas d'autre chose à faire de cet argent que de baisser encore leurs impôts. Elles pourraient ainsi compenser, pour elles uniquement, la hausse concomitante des impôts cantonaux, accroissant au passage la concurrence fiscale au détriment des nombreuses communes moins bien dotées qu'elles et qui ne pourraient pas suivre – et tant pis pour la solidarité.
Que la péréquation intercommunale doive être revue, c'est l'évidence – tout le monde s'y est d'ailleurs engagé. Mais ce n'est pas en jouant les éléphants dans le magasin de porcelaine que certaines riches communes de La Côte peuvent escompter y parvenir.
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