Il a pris du temps, hésité, encaissé les critiques de ses ministres Verts et libéraux, des Polonais, des Baltes, des Ukrainiens, de presque l’Europe entière… Mais il a obtenu ce qu’il voulait: former une coalition internationale avant de livrer des chars à l’Ukraine. Et faire de l’Allemagne l’intendant le plus discret possible de cette alliance, en lâchant un lot limité de quatorze Leopard 2 – à peine un demi-bataillon – qui s’ajouteront à d’autres Leopard livrés par la Pologne, la Norvège ou l’Espagne, à quatorze Challenger promis par le Royaume-Uni, à des Leclerc que la France sera contrainte de céder, et surtout, à des Abrams américains.
Olaf Scholz a convaincu Joe Biden de ne pas laisser les panzers allemands seuls sur le champ de bataille ukrainien, une ligne rouge pour le chancelier, contraint de franchir un nouveau palier dans l’aide militaire à l’Ukraine. En onze mois, l’Allemagne est passée, comme d’autres alliés, de la fourniture de casques à la livraison de blindés lourds à Kiev. Une gradation motivée par la brutalité de l’agression russe et la crainte d’un conflit sans fin.
Rien ne garantit que les chars livrés à Kiev changeront la face de la guerre. Tout dépendra de leur nombre, de la date de leur livraison, de la capacité des Ukrainiens à se former et à assurer la logistique de plusieurs types de blindés sophistiqués. Suffiront-ils pour percer les lignes de défense russes? Contrer les vagues de nouveaux mobilisés envoyés par Moscou? Regagner des territoires? On le saura à l’été ou même à l’automne. Ce qui est sûr en revanche, c’est qu’Olaf Scholz a réussi à préserver l’unité du bloc occidental après onze mois de guerre. Un exploit au moment où les alliés tentent de soutenir l’Ukraine de façon décisive, sans dégarnir leur propre défense ni risquer l’escalade.
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Éditorial – Scholz et le demi-bataillon
En donnant son feu vert à l’envoi de chars Leopard à l’Ukraine, le chancelier allemand préserve l’unité occidentale face à la Russie. Essentielle dans un conflit qui s’annonce long et incertain.