Métiers d’avenir«Selon un vieux préjugé, l’écologie est contre l’économie»
La Suisse manque cruellement de compétences pour réaliser sa transition énergétique. La faute à des idées reçues, selon la Verte Adèle Thorens.

Les métiers de la transition énergétique sont à la traîne en Suisse, au point de mettre en péril les objectifs climatiques de la Confédération. Cela nécessite un effort considérable en termes de formation, selon Adèle Thorens. La conseillère aux États est également présidente de l’OrTra Environnement, une association professionnelle de l’économie de l’environnement. Elle sert de plateforme entre acteurs de la formation, autorités fédérales et employeurs.
Les jeunes sont dans la rue mais se désintéressent des formations de l’environnement. Pourquoi?
Il y a un problème de perception de ces métiers. Il y a ce préjugé qui dit: si vous voulez agir pour l’environnement, vous devez être un intellectuel, faire l’EPFL ou être biologiste. Or, les compétences manuelles, techniques et pratiques sont absolument indispensables. On a besoin de personnes qui montent sur les toits et installent des panneaux solaires. Cela ne suffit pas de conceptualiser, il faut réaliser! Il faut aussi faire passer le message qu’il y a du travail dans ce domaine et que ce sont des métiers d’avenir, avec des hauts niveaux de qualifications et où l’on peut obtenir aussi de bons revenus. Le problème des préjugés se situe malheureusement à plusieurs niveaux.
C’est-à-dire?
En ce qui concerne le développement durable, il manque au monde politique et à certains milieux économiques la capacité d’anticiper ou d’avoir ce fameux esprit pionnier. Il faut se débarrasser d’un vieux biais selon lequel l’écologie est contre l’économie. Le SEFRI qui est le Département responsable de la formation professionnelle, proche de l’économie, a fait une stratégie pour les années 2022 à 2030. Le développement durable n’y figure pas! Ce sont les départements de l’environnement et de l’énergie qui sont actifs dans la promotion des compétences environnementales, c’est significatif.
Comment inverser la tendance?
La Suisse est de toute façon obligée de suivre le mouvement. L’UE prend des décisions très strictes, comme l’interdiction des nouveaux véhicules thermiques dès 2035 ou le plan d’action pour l’économie circulaire. Les métiers de la réparation et de l’entretien devront se développer. Il faudra des compétences bien spécifiques pour concevoir de nouveaux matériaux ou gérer des batteries. Cela reposera aussi sur des compétences de numérisation pour la traçabilité des matériaux. A-t-on des filières adaptées? Je crains que non. Il est temps de s’en préoccuper.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.