Les entreprises et le coronavirusSoignez-moi.ch, la consultation médicale en ligne à portée de clic
Née à Vevey, la plateforme donne accès à des médecins généralistes pour les soins de premier recours et une ordonnance.

Entre les visites ordinaires au médecin de famille et les cas nécessitant un appel au 144 ou de se rendre au plus vite aux urgences, combien de maux de santé peuvent-ils être traités rapidement, à moindre coût, grâce à une consultation en ligne de médecins généralistes? Lancée à Vevey il y a un peu plus d’une année, la plateforme privée Soignez-moi.ch se veut la pionnière en Suisse de l’e-consultation pour les soins de premier recours, indépendante des assureurs maladies.
Depuis son démarrage en octobre 2019, le cabinet médical en ligne a déjà traité plus de 12’000 patients en Suisse romande, selon Romain Boichat, son directeur opérationnel, initiateur du site avec la directrice générale Carole Matzinger. Dans quelques mois, la société lancera son service en Suisse alémanique avec un objectif de 20’000 consultations à distance la première année d’activité.
Pour l’heure, deux hôpitaux – l’Hôpital de la Tour à Meyrin et le Centre hospitalier Bienne – utilisent la plateforme pour leurs urgences simples. Le second – qui a pris récemment une participation dans la start-up vaudoise aux côtés des fondateurs et de la Coopérative professionnelle des pharmaciens suisses, majoritaire – est d’ailleurs chargé de former l’équipe de médecins généralistes qui seront bientôt opérationnels outre-Sarine.
Généralistes expérimentés
À la différence d’autres opérateurs de consultation en ligne, les répondants sont tous des généralistes FMH expérimentés qui pratiquent en Suisse. Ils consultent à distance à temps partiel – depuis leur cabinet ou leur domicile – correspondant à 5 à 20% de leur activité professionnelle. Les médecins de Soignez-moi.ch sont actuellement 17.
Comment fonctionne cette consultation en ligne sans rendez-vous? On commence par répondre à un questionnaire en ligne (sans s’inscrire au préalable) du même type que celui du médecin dans une permanence médicale. Il s’agit de définir son mal sur la base de 40 symptômes générant chacun son questionnement. C’est là que l’entreprise réunit l’innovation technologique de cet outil numérique et la pratique médicale.
Grâce aux algorithmes de tri, les questions doivent amener la plateforme et le médecin à faire un diagnostic rapide et précis. Le patient peut être orienté vers une pharmacie partenaire pour un examen basique (tension, urine, frottis non Covid, etc.) et la prise d’un médicament, ou vers son médecin habituel, voire les urgences. La plateforme multilingue garantit un appel du médecin dans l’heure si elle aboutit à une consultation, mais le plus souvent c’est le quart d’heure.
Éviter les heures d’attente
Le principal avantage de la consultation à distance est d’éviter les heures d’attente, de plus en plus courantes et presque systématiques dans les centres urbains. Directeur médical, Daniel Fishman, qui a une expérience de vingt ans dans la médecine d’urgence – il a dirigé ce service par intérim au CHUV avant de le gérer dans les hôpitaux de Sion et de Riviera Chablais –, observe que la télémédecine répond à un véritable besoin, même si elle existe depuis l’existence du téléphone. Mais avec les outils modernes – transmission de photos par smartphone ou visioconférence – elle simplifie beaucoup la vie, notamment des personnes habitant loin des centres.
Nous ne voulons pas nous substituer au médecin traitant. La relation directe avec le patient est d’une importance absolue
La jeune entreprise rappelle que la télémédecine est une des solutions au manque de médecins généralistes. Elle fait également le constat que 20% de la population suisse affirme renoncer à consulter un médecin pour des raisons économiques. Le directeur médical souligne qu’il n’est pas question «de se substituer au médecin traitant et de remplacer la relation directe avec le patient, d’une importance absolue», mais nombre de maux peuvent être réglés plus simplement par ce moyen.
Il prend l’exemple d’une femme qui souffre horriblement d’infection urinaire. Elle n’a généralement pas besoin d’aller aux urgences pour un examen physique. À l’issue de la consultation en ligne, elle pourra obtenir du médecin de la plateforme une ordonnance électronique sécurisée pour un médicament ou un arrêt de travail. La consultation et le traitement à distance sont facturés 59 francs maximum, somme remboursée par les assurances maladies de base selon les modalités usuelles (franchise, 10% de quote-part jusqu’à 700 francs).
Alertes par SMS
Le service comprend un suivi de quarante-huit heures, avec des alertes par SMS afin de vérifier que les symptômes ont disparu ou d’adapter la prise en charge. Par contre, si le patient ne peut être traité à distance et que le prédiagnostic (sur la base du questionnaire) montre qu’il doit consulter son médecin ou les urgences, le service est gratuit.
Celui-ci est accessible seulement de jour (8h-19h) et le week-end sur une période restreinte. Carole Matzinger rappelle en effet qu’il ne s’agit pas d’une plateforme pour les urgences vitales et que les soins de premiers recours sont dépendants des horaires des pharmacies.
Sur le plan médical, le site – accessible dès 18 ans – est régi par toutes les modalités et réglementations applicables en Suisse, en termes de protection des données, délivrance d’ordonnances, etc.
400’000 appels visés
Les fondateurs relèvent que la plateforme est prête à fournir d’autres services de télémédecine comme la pré-anesthésie et le suivi de maladies chroniques, tel le diabète, en travaillant avec des médecins spécialisés. Lors du semi-confinement, elle a développé ses outils pour une consultation sécurisée à distance de l’Hôpital ophtalmique de Lausanne. Soignez-moi.ch compte atteindre 400’000 appels sur toute la Suisse d’ici quatre ans. Il en faut le quart pour que la société soit rentable.
Lancé quelques mois avant la pandémie, le service en ligne a été boosté quand les cabinets ont dû fermer. Mais la directrice générale regrette que l’e-consultation ne soit pas encore un réflexe répandu dans la population au vu de ses atouts. Avec Romain Boichat, elle déplore que le monde politique ne la perçoive pas à sa juste mesure dans notre système de santé coûteux. À l’exception du Jura qui, débordé par la seconde vague de Covid, a mandaté la société pour le suivi des personnes en isolement et en quarantaine.
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