Après des mois de négociations, le 26 mai 2021, le Conseil fédéral communiquait à l’UE qu’il ne signait pas le projet d’accord institutionnel. Ce résultat a été obtenu en grande partie grâce aux syndicats, qui ont refusé l’affaiblissement des mesures d’accompagnement à la libre circulation des travailleurs. Au vu du blocage des discussions entre la Suisse et l’UE, les réactions en Suisse ont été, à droite, une volonté de libéraliser davantage le marché intérieur, et, dans certains rangs de gauche, de relancer l’idée de l’adhésion à l’Union européenne.
L’échec de l’Espace économique européen en votation le 6 décembre 1992 avait abouti aux accords bilatéraux avec des mesures d’accompagnement pour la libéralisation du marché du travail. Mais, parallèlement, les salariés de notre pays avaient également subi une offensive des milieux néolibéraux avec la parution d’un «Livre blanc» en 1995 ayant conduit notamment à une révision de l’assurance chômage, la fin du statut de fonctionnaire, l’ouverture des marchés publics et la libéralisation des télécoms.
«L’occasion de renforcer les droits de ceux qui produisent la richesse de la Suisse.»
Le danger est donc grand que certains milieux patronaux, prétextant le refus de l’accord-cadre, reviennent avec des projets d’affaiblissement des droits des travailleurs. L’UDC Suisse, à cet égard, a choisi comme stratégie de miser non pas sur l’UE mais sur des accords de libre-échange avec les pays d’Amérique du Sud (Mercosur), l’Asie et les États-Unis, tout aussi néfastes pour l’environnement, la souveraineté industrielle en Suisse que la protection sociale des agriculteurs de notre pays.
Pourtant, la solution quant à l’amélioration de notre coopération internationale ne saurait passer non plus par une adhésion à l’Union européenne comme le promeut aujourd’hui le PS suisse. Elle serait synonyme d’un affaiblissement significatif des droits populaires et démocratiques, de renchérissement de la vie pour les plus pauvres (augmentation de la TVA) et de soumission à la jurisprudence libérale de l’Union européenne.
Au contraire, ce refus de l’accord-cadre est l’occasion de renforcer les droits de ceux qui produisent la richesse de la Suisse. Profitons-en pour changer de paradigme et proposer celui de protectionnisme solidaire: ce dernier propose de renégocier les accords bilatéraux pour servir les intérêts de toute la population, en opérant notamment une relocalisation progressive de la production qui respecte l’environnement et les droits sociaux.
Préférence locale
Introduisons une préférence locale sur le marché du travail, imposons le respect de normes sociales et écologiques pour la commercialisation de produits en Suisse, et privilégions nos entreprises locales sur les marchés publics, tout en soutenant activement la politique de cohésion de l’Union européenne.
Il est temps que la Suisse s’engage activement à l’encontre des instances qui placent la libre circulation des capitaux et des marchandises au-dessus des droits sociaux, et qui donnent les pleins pouvoirs aux multinationales plutôt qu’aux PME, aux actionnaires plutôt qu’aux salariés, à la finance plutôt qu’aux travailleurs.
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L’invitée – Suisse-UE: pour un protectionnisme solidaire
Anaïs Timofte souhaite notamment une relocalisation progressive de la production au service de la population.