Traquez les accents… Pour aider la science
Un jeu en ligne vous invite à deviner de quel canton romand proviennent des enregistrements de personnes

Traquez les «e» qui traînent et les «o» qui s'ouvrent! Des linguistes proposent aux Suisses de tester leur capacité à localiser les accents romands. Ils ont conçu un jeu en ligne, disponible sur le site www.tonaccent.ch. Les participants sont d'abord invités à un Tour de Suisse amateur, dans lequel ils écoutent des courts enregistrements et doivent identifier le canton du locuteur. Suit un niveau «expert», où il faut carrément trouver la localité pour gagner un maximum de points.
Au-delà de l'approche ludique, le but est de nourrir une recherche scientifique. Les joueurs sont invités à s'inscrire et à fournir quelques informations personnelles. Un forum est aussi disponible, dans lequel vous pouvez notamment dire quel est votre accent préféré et pourquoi. Les données collectées doivent déterminer à quel point nous reconnaissons un accent. Les chercheurs souhaitent savoir quels indices nous aident, si la réponse est plus facile suivant le profil socio-économique du locuteur… Ou encore: les Vaudois repèrent-ils plus facilement les Genevois que les Valaisans?
Pour le français, le responsable du projet est Mathieu Avanzi. Ce spécialiste de la géographie linguistique a déjà étudié les français régionaux à l'Université de Neuchâtel. Il avoue avoir lui-même eu quelques difficultés à trouver les bonnes réponses au nouveau jeu. Il faut dire que les indices lexicaux ou de nature religieuse ont été évités. Ne reste que le son. Les 150 enregistrements utilisés proviennent d'une base de données hébergée à l'Université de Neuchâtel. Les intervenants sont nés et ont grandi dans une région et leur interlocuteur a la même origine. Au feu les stéréotypes! Tous n'ont pas un accent marqué. L'idée est de présenter un échantillon représentatif des cantons, des âges, des sexes, de la ville ou de la campagne…
La Suisse est un terrain de jeu passionnant pour les linguistes. «Dans la francophonie, il est rare de trouver de telles différences d'accents sur un si petit territoire, commente Mathieu Avanzi. Les gens en sont aussi conscients et revendiquent cette capacité à distinguer les origines.» Comment expliquer cette diversité? «Le patois a perduré plus longtemps dans certains cantons. L'ouverture des frontières n'est pas non plus si ancienne et les montagnes ont isolé les populations. Finalement, l'esprit fédéral se maintient: les gens sont fiers de leur canton.»
Aujourd'hui, certains traits disparaissent. Le «r» roulé, par exemple, n'existe pratiquement plus. Mais si les Genevois font de moins en moins la différence entre le «in» de «brun» et «brin», les Vaudois restent attachés au «e» final de «année»! Ces marques d'origine contrôlée intéressent vivement le public. La technologie facilite aussi les recherches et les échanges. Ainsi, alors que le jeu «Tour de Suisse: ton accent» a été lancé mardi, 300 à 400 participants étaient déjà inscrits jeudi matin.
L'étude, menée par l'Université de Zurich, est soutenue par le Fonds national. Elle sera également effectuée outre-Sarine, avec un jeu disponible dans les prochains jours. «Nous pensions que les accents alémaniques seraient plus faciles à reconnaître. Mais les étudiants qui ont testé le système ont eu beaucoup de difficultés, note Mathieu Avanzi. Il semble que la standardisation des dialectes alémaniques est plus importante qu'on ne le pense.»
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Le blog du chercheur Mathieu Avanzi: francaisdenosregions.com
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