Exotisme vaudois (26/41)Un authentique paradis rural s’épanouit au-dessus de Lucens
Confiné dans son musée, Sherlock Holmes n’y aurait trouvé aucune trace de malfaisance: les enfants qui séjournent dans la ferme à loisirs de Cremin se lient d’amitié avec les animaux domestiques. Et ceux-ci le leur rendent bien.

À l’âge respectable de 35 ans, la chèvre Barbichette s’en donne à cœur joie pour manger les pruneaux en grimpant à l’échelle. Autour d’elle, les poules n’en ont cure et s’égayent dans le verger dans lequel des joueurs en herbe tentent leurs premiers coups de swin-golf, forcément un peu maladroits. Les gallinacés se laissent volontiers porter par les enfants, qui peuvent toucher tous les animaux domestiques et promener les deux chevaux miniatures, Zorro et Arielle, pas plus hauts que trois pommes. Ainsi va la vie dans la ferme à loisirs de Cremin, au chemin des Écoliers. Le bonheur des familles est dans les prés, au-dessus de Lucens, un havre de paix dans la campagne vaudoise avec vue panoramique sur les Préalpes fribourgeoises et la verdoyante vallée de la Broye.

Sherlock Holmes, qui depuis les années 60 a son musée à Lucens, n’y trouverait – sans doute – aucune trace de malfaisance. Peut-être un peu d’exotisme, lui qui est habitué aux rues sombres et envahies de brouillard de Londres. En ce mois de juillet, ce coin de Pays de Vaud est éclatant de toutes les couleurs: rouge coquelicot, jaune tournesols et jaune céréales, blanc marguerite, bleu de bleuets, et naturellement, vert dans toutes les tonalités qu’on trouve dans les forêts et champs d’herbe. En suivant l’itinéraire en boucle appelé «sentier Aventures», qui part de la gare de Lucens et mène au petit village de Cremin – et qui passera à côté du château au retour – notre célèbre personnage aurait apprécié le bol d’air pur en pleine nature. Sur le chemin, balisé par un étang et des passerelles de bois, il aurait pu admirer, avec un petit vertige, le pont suspendu. Un bel ouvrage duquel on voit loin à l’horizon.

En traversant le parcours du swin-golf, qui se joue avec une seule canne et une balle molle, accessible à tous, on découvre les deux cabanes luxueuses perchées dans les noyers de la ferme. Deux familles avec des enfants en bas âge, l’une de Genève, l’autre de Nyon, y résident plusieurs jours en ce milieu de juillet. Aucune ne regrette son voyage annulé à Marrakech et en Corse. Elles découvrent dans la campagne vaudoise un autre paradis sur terre, un monde rural authentique où elles sont en contact rapproché avec la nature et des animaux dociles. Une proximité qui change des habitudes de la vie quotidienne, même si dans leur cabane, les résidents gardent tout leur confort.
Cette forme de tourisme rural est encore trop rare dans le canton de Vaud. Elle tient avant tout aux initiatives et à l’accueil des hôtes du lieu, Michel Bessard, agriculteur et propriétaire, et Christophe Mois, qui s’occupent des activités loisirs à la ferme. Pendant ce temps, le frère de Michel gère l’exploitation traditionnelle, l’élevage du bétail et les cultures.

La bonhomie et la convivialité des deux compères imprègnent l’atmosphère de la maison d’hôtes. Avec un moment fort dans la journée: le petit-déjeuner préparé avec soin, en conjuguant les produits maison et de saison. Même le café est torréfié dans la région. Une nouvelle décoration de table est réalisée chaque jour, avec les fleurs fraîchement cueillies. Après la table rose, c’est aujourd’hui le jour «violettes». Le genre de tableau qu’on imagine peindre Cézanne.
Le déjeuner est pour Michel et Christophe le moment privilégié d’un échange avec leurs hôtes et pour raconter la vie à la ferme. «C’est une occasion pour les accompagner, dit le premier. Car nous ne vendons pas une chambre d’hôtel, mais une activité et un accueil particuliers.»

Les produits du terroir
Avec la même patience qu’il montre avec les jeunes joueurs de swin-golf pour leur enseigner les rudiments de ce divertissement, le propriétaire des lieux ne se lasse pas de décrire toutes les richesses de son terroir. Il se fait une joie de faire la promotion des produits de la ferme traditionnelle et de mettre en valeur le travail à la campagne. Un message que les enfants citadins, si heureux au contact des animaux complaisants, pourraient garder longtemps en souvenir.
Michel raconte également, jusque dans les détails, les nombreuses activités proposées aux touristes dans la région. Elles ne manquent pas. Si le château de Lucens, ancienne forteresse passée sous le joug des Bernois durant plus de deux siècles, aujourd’hui en mains privées, n’est pas ouvert à la visite, on a de quoi se défouler dans les environs, sans boulet: à pied, à vélo, sur un âne ou un cheval, dans l’eau ou même attaché à une corde.
Pour la baignade au lac, on peut se rendre – à un peu plus de vingt minutes en voiture – à Cheyres (FR) ou du côté d’Yvonand, dont la plage de sable est très méditerranéenne. Les plus téméraires, et non sujets au vertige, choisiront de s’éclater les pieds loin du sol, sur l’ancienne antenne de l’émetteur national de Sottens. 125 mètres de haut. Il paraît que, là-haut, la vue est particulièrement belle et on peut y manger la fondue. Mais ne me demandez pas quelles sensations on ressent dans cette escalade: je ne suis pas en équilibre sur cette longueur d’onde!

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