«Un ballet réussi doit vous emporter»
Gil Roman, directeur artistique du Béjart Ballet Lausanne, présente le programme d'été de sa onzième saison, quatre pièces éclectiques

Juste à côté des locaux de répétition, désormais propriété du Béjart Ballet Lausanne (BBL), le bureau du chorégraphe est baigné par la musique de piano qui accompagne l'entraînement des danseurs. Gil Roman vient à peine de les quitter, mais songe déjà à reprendre le travail pour présenter quatre ballets aussi parfaits que possible.
Qu'est-ce qui vous a donné envie de reprendre «Syncope», le ballet que vous avez créé il y a huit ans?
Gabriel Arenas Ruiz, le danseur qui avait incarné le rôle principal, a quitté la compagnie pendant un temps. J'ai laissé ce ballet en arrière-plan, mais partout où on l'a tourné, le public l'a beaucoup aimé. Gabriel est revenu et c'était le bon moment pour reprendre ce ballet. Beaucoup de danseurs de la compagnie ne l'ont jamais dansé, ce qui est une conjonction assez idéale d'expérience et de nouveauté. C'est important d'être imbibé par ceux qui l'ont dansé. Le nouveau danseur peut être pour ou contre, mais il nourrit ainsi son imaginaire pour sa propre interprétation.
C'est dans le même esprit que vous avez voulu transmettre le solo «Un cygne d'autrefois…» que vous avez vous-même créé?
Oui. C'est un solo qui est en quelque sorte du pur Béjart. Maurice m'a fait beaucoup de solos mais celui-ci, que l'on n'a presque jamais présenté sur scène, laisse beaucoup de place à l'interprétation. Il faut y trouver sa liberté tout en se noyant dans la musique de Wagner et, en même temps, en garder les respirations. C'est un genre de solo romantique, assez rare chez Béjart. Il faut s'y abandonner tout en restant très précis.
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Pourquoi avoir choisi Julien Favreau et Jiayong Sun pour le danser?
Julien Favreau est à maturité pour faire ce genre de solo. C'est lui mettre à disposition une partition qui lui permet de chercher sa propre vérité. Et c'est pareil pour Jiayong Sun. J'avais envie de faire émerger leur propre lumière.
Ce même genre de lumière que vous avez perçu chez Yuka Oishi?
Oui. Il y a une espèce de force, de douceur et d'assise qui m'a frappé chez cette jeune chorégraphe. Elle a une personnalité très particulière. J'ai beaucoup aimé son travail. Ensuite j'ai aimé sa manière d'aborder les danseurs. Elle sait ce qu'elle veut, mais laisse venir naturellement les choses.
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Le lien entre ces quatre pièces, ne serait-ce pas justement la lumière?
Oui, peut-être. C'est vrai que le ballet d'ouverture que j'ai demandé à Julio s'appelle «Éclats». C'est une pièce où on utilise beaucoup la technique classique. Du mouvement et du plaisir. Après il y a mon ballet «Syncope» qui est un voyage où on se lave en quelque sorte le cerveau. Ensuite le solo de six minutes amène vers la flamme de vie et on termine par «Ku», le ballet de Yuka habité par quelque chose de profondément humain et mystérieux. Ces trois derniers ballets sont en effet liés à une recherche de lumière.
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Il y a très peu de Béjart, est-ce une nouvelle ligne?
Pas du tout. Je remonterai une grande pièce à Noël. Mes saisons sont toujours équilibrées. J'aime présenter des pièces plus simples de Béjart et montrer de nouvelles créations contemporaines qui défendent une certaine manière de danser. En l'occurrence, nous sommes trois chorégraphes qui avons appris et dansé la technique classique. Il y a une grande évolution du classique qui est notre langage de base. C'est important que les gens le voient et qu'ils comprennent que l'on peut tout faire avec le classique.
La technique classique doit-elle être défendue à tout prix?
Dans certaines écoles, l'enseignement de cette technique n'a pas évolué et on a laissé de côté certains mouvements. On trouve de plus en plus difficilement des danseurs capables de faire de petites batteries en l'air. On a déjà perdu des pans entiers de notre vocabulaire classique. La technique doit évoluer, mais il faut garder le savoir. Les pédagogues classiques n'ont pas encore trouvé de solution pour que les jeunes aient envie de travailler avec rigueur, mais dans le plaisir. La danse classique est comme un langage et c'est dommage d'en perdre des mots. On perd des possibilités d'inventions alors que pour qu'un spectacle soit réussi il faut vraiment être emporté. Le diable c'est l'ennui! disait Brooke…
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