Signé LausanneUn Colisée comme resurgi de terre
Le grand îlot arrondi autour duquel s’articule le quartier Saint-Pierre sort d’une impressionnante rénovation, qui éclaire son histoire complexe.

Aux habitants du quartier, le grand édifice semble être soudain réapparu. Débarrassé des échafaudages derrière lesquels il se cachait depuis un an, le «Colisée» de la rue Saint-Pierre arbore une nouvelle façade toute claire.
«L’immeuble avait depuis longtemps des teintes moutarde, un peu sales; c’est aussi pour cet effet psychologique que nous avons choisi le gris clair et le blanc», raconte Colette Raffaele, du bureau d’architectes Personeni Raffaele, responsable du chantier de rénovation.
Le grand édifice, tout en arcades et en arrondis rares à Lausanne, a une histoire riche. Ses fondations les plus anciennes remontent à 1676, lorsqu’un hôtel y était accolé à l’une des portes de ville. Après la destruction de la muraille d’enceinte, au début du XIXe, le quartier se développe.
En 1844, le bâtiment de la rue Saint-Pierre 1 vient y joindre ses arcades, accompagnant le tracé de la rue Caroline fraîchement créée. Des immeubles disparates se collent encore à la structure, populaires côté Marterey (1870), plus cossus côté Enning, au tournant du siècle.
C’est à la fin des années 1940 que l’ensemble prend sa forme actuelle. Parallèlement à l’ajout d’étages pour homogénéiser la hauteur du tout, on creuse un immense espace pour faire place au cinéma Atlantic.
Dotée de 800 places, «munie des derniers perfectionnements de la technique moderne», la salle est inaugurée en grande pompe le 20 janvier 1949 (en présence du Général Guisan, relatent les journaux de l’époque). Cette partie sud de l’îlot prend alors son glorieux nom antique; la Société immobilière Colisée Saint-Pierre en est toujours propriétaire aujourd’hui.
Avec sa devanture océanique, l’Atlantic a fait rêver jusqu’au mitan des années 2000, époque à laquelle la plupart des cinémas lausannois fermeront leurs portes. Ce grand espace abrite depuis 2016 le restaurant Luigia. «Lorsque nous avons commencé les travaux début 2020, l’idée était encore de conserver la façade en granit rose, explique Colette Raffaele. Mais nous nous sommes vite aperçus qu’elle tombait en morceaux. Le grand chantier des années 1940 avait quelques côtés un peu bricolés… Nous avons dû changer d’idée.»
Le résultat est sobre et lumineux. Les piliers se sont parés de calcaire de Tournai, les corniches ont nécessité l’intervention des tailleurs de pierre de la société Lachat & fils, la même qui restaure la cathédrale.
Pour l’identité visuelle, l’ensemble entend se doter d’un graphisme homogène mais permettant une certaine souplesse», déjà visible notamment sur la devanture du Happy Days. Les travaux sont toujours en cours sur les immeubles Marterey 1 et 3 et se poursuivront l’année prochaine côté Enning.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.