Par-delà les siècles et les frontières, notre démocratie s’enorgueillit de sa volonté de garantir une séparation des pouvoirs claire et transparente. Ce n’est pas un acquis; ce doit être une vigilance de tous les instants. Justice et politique ne font pas bon ménage. Les dictatures ou démocratures actuelles en sont des exemples criants. Les démocraties occidentales ne sont pas à l’abri: les «affaires politico-médiatico-judiciaires» de nos voisins le démontrent amplement et tendent à renforcer la méfiance vis-à-vis des politiciens et magistrats réduits trop facilement et injustement à une forme de coterie.
Le canton de Vaud n’échappe pas à ce risque. Aujourd’hui, pas moins de cinq commissions du Grand Conseil gravitent autour du pouvoir judiciaire: mal coordonné, mal structuré, le système actuel a connu des couacs retentissants ces dix dernières années. L’affaire Marie, pour spectaculaire qu’elle fut, n’est hélas que la pointe de l’iceberg. Chacun y est allé de bon cœur, donnant ainsi une image peu sérieuse de nos institutions et de leur fonctionnement. À l’inverse, on ne saurait vivre dans une république de magistrats. L’Ordre judiciaire, comme tout appareil étatique, doit faire l’objet d’un contrôle, soit soumis au regard et à l’appréciation critique de tiers.
«Le système actuel, qui voit une commission du Grand Conseil apprécier les défauts et qualités des candidatures, est désuet.»
Nous voterons en septembre une modification constitutionnelle visant à instituer un Conseil de la magistrature qui a connu un long et large processus de maturation et de consultation, soutenu par un large éventail du Grand Conseil. Le Conseil de la magistrature offre des garanties de transparence, de stabilité et de cohérence dans la surveillance de l’Ordre judiciaire, dans l’élection des hauts magistrats de ce canton en y intégrant également le Ministère public.
C’est une réforme majeure. Les prérogatives électives du Grand Conseil cependant subsistent. Le système actuel, qui voit une commission du Grand Conseil apprécier les défauts et qualités des candidatures, est désuet. On ne dispose pas aujourd’hui des outils légaux pour procéder à une évaluation pertinente, discerner des incompatibilités ou se prononcer sur la respectabilité ou l’éthique des candidats; ces exigences sont plus élevées qu’à l’époque où le Tribunal cantonal ne se composait encore que d’une quinzaine de juges.
Un système d’un autre temps
L’élection des hauts magistrats en fonction de leur appartenance politique reste problématique. Le Grand Conseil n’a pas souhaité «couper le cordon», suite à un texte déposé par le soussigné. C’est un choix précaire. La plus haute fonction judiciaire de notre canton devrait revenir aux magistrats les plus chevronnés et non pas varier selon l’étiquette politique. Il en va de la sécurité du droit et de la stabilité des jurisprudences. Reste encore la question des cotisations versées par les magistrats élus à leurs propres partis, système qui relève d’un autre temps, pas très loin de la vénalité des charges.
Mais le Conseil de la magistrature constitue déjà une étape décisive vers plus de transparence et de cohérence dans la surveillance de l’Ordre judiciaire et l’élection des juges.
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L’invité – Un Conseil de la magistrature: pour quoi faire?
Marc-Olivier Buffat souhaite davantage de transparence et de cohérence dans la surveillance de l’Ordre judiciaire et l’élection des juges.